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La menace nucléaire de Poutine vise à dissuader mais le risque n'a pas augmenté

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interviewée par Daphné Benoît pour l'

  AFP
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En brandissant encore jeudi la menace nucléaire, le président russe Vladimir Poutine espère dissuader les Occidentaux d'aider l'Ukraine mais "il n'y a pas de signe plus important de risque d'emploi de l'arme nucléaire", souligne à l'AFP Héloïse Fayet, experte à l'Institut français des relations internationales.

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Pourquoi Vladimir Poutine agite-t-il de nouveau la menace nucléaire dans son adresse à la Nation?

Ce genre de déclaration a une visée de politique intérieure, afin de maintenir l'effort de guerre et les troupes mobilisées. Le président russe rappelle aussi régulièrement l'existence de la dissuasion face à une alliance nucléaire, l'Otan, et face aux puissances nucléaires que sont les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni.

Il s'agit enfin de rappeler que la Russie ne dispose pas uniquement d'armes nucléaires mais aussi de capacités conventionnelles qui peuvent atteindre le territoire européen, avec ce qu'on appelle des armes stratégiques non nucléaires, d'une portée comprise entre 1.500 et 2.000 ou 3.000 km.

Ces déclarations entrent dans la catégorie du signalement stratégique, ce que toutes les puissances nucléaires font. Poutine espère que cela aura des conséquences sur l'opinion publique occidentale, que nous serons ainsi dissuadés de fournir plus d'armes à l'Ukraine.Or on voit bien depuis deux ans ça ne fonctionne pas.

La Russie est-elle susceptible d'utiliser l'arme nucléaire en réponse à l'envoi de militaires européens en Ukraine, hypothèse avancée lundi par  le président français Emmanuel Macron?

Non, pas du tout.La doctrine nucléaire russe identifie quatre cas d'usage et tous concernent l'attaque contre le territoire russe ou l'hypothèse dans laquelle la situation serait tellement dramatique, le risque de perdre la guerre serait tellement important pour la survie de la Russie que la pays pourrait se résoudre à utiliser l'arme nucléaire. Je ne pense pas que l'envoi de militaires occidentaux pour des missions de soutien pour l'artillerie ou la formation soit considéré comme un risque existentiel pour la Russie, qui a vu pire.La Russie ne va pas disparaître si on envoie 100 soldats dans l'Ouest de l'Ukraine. Je rappelle enfin que l'arme nucléaire n'a pas été utilisée depuis 1945.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, a-t-on observé un changement de posture nucléaire de la Russie ?

Jusqu'à présent la doctrine nucléaire russe rendue publique en 2020 a été respectée.La Russie a toujours les armes nucléaires en tête pour sanctuariser son territoire et rappelle régulièrement qu'en cas d'atteinte au fonctionnement de l'Etat, elle se réserve le droit de les utiliser, exactement comme la France se réserve le droit d'utiliser des armes nucléaires en cas d'atteinte à ses intérêts vitaux.

On voit une modernisation de l'arsenal nucléaire qui s'intensifie et se poursuit, mais c'est relativement cohérent par rapport à ce que font les Etats-Unis ou la France.

On est dans un rapport dissuasif relativement équilibré et pour l'instant il n'y a pas de signe plus important de risque d'emploi de l’arme nucléaire.

C'est grâce à ces armes nucléaires que la Russie a pu conquérir l'Ukraine.Elle savait que l'Occident n'attaquerait pas directement le territoire russe en raison de la dissuasion nucléaire.De l'autre côté c'est grâce aux armes nucléaires de l'Occident que le conflit ne s'est pas étendu au-delà de l'Ukraine.

Après, une fois que la guerre sera terminée, les capacités conventionnelles de l'armée seront très affaiblies, quel sera le rôle des armes nucléaires russes dans une Russie post-Ukraine ? C'est ce qu'on avait observé à la fin de la Guerre Froide: la Russie s'est alors reposée un peu plus sur les armes nucléaires mais cela s'est rééquilibré depuis.

> Lire l'interview sur le site de l'AFP

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Héloïse FAYET

Héloïse FAYET

Intitulé du poste

Chercheuse, responsable du programme dissuasion et prolifération, Centre des études de sécurité de l'Ifri