Publié le 02/09/2016

Thomas GOMART, tribune parue dans l'Expansion

Le pivot résume à lui seul la politique étrangère de Barack Obama. Jusqu’à dernièrement, l’Amérique a privilégié la zone Asie-Pacifique. Sur le plan stratégique, la montée en puissance de la Chine inquiète ses voisins et oblige Washington à renforcer ses accords de sécurité, en particulier avec le Japon et Taïwan. Sur le plan économique, le TPP (Trans-Pacific Partnership), signé en février 2016, réunit désormais douze pays. En cours de négociation, son pendant atlantique, le TTIP (Transatlantic Trade Investment Partnership), suscite de profondes oppositions.

Les exportations des Etats-Unis vers l’Union européenne (Royaume-Uni inclus) représentent seulement 40 % de ses exportations vers les pays du TPP. A cela s’ajoutent les échanges avec la Chine, bien supérieurs à ceux réalisés avec l’UE. Les Etats-Unis regardent donc l’Asie-Pacifique comme une région prioritaire.

Cependant, les deux principaux candidats – Hillary Clinton et Donald Trump – envisagent aujourd’hui de ne pas ratifier le TPP. Pour Hillary Clinton, il s’agit très probablement d’un positionnement tactique par rapport à Bernie Sanders, son ex-rival démocrate. Pour Donald Trump, dont le programme de politique internationale se résume à quelques saillies médiatiques, toute alliance militaire ou tout accord commercial doit dépendre d’un simple calcul coût/bénéfice. Ainsi, les Etats-Unis pourraient ne plus apporter de garanties à des pays alliés comme l’Allemagne, le Japon ou la Corée « pour une poignée de cacahuètes ». Entre propos de campagne et engagements internationaux, il y a un gap que le ou la futur(e) président(e) devra franchir.

Le prochain mandat présidentiel correspondra donc à un double mouvement : poursuite du pivot vers l’Asie et réengagement en Europe. En raison de la dégradation rapide de l’environnement stratégique de cette dernière, les Etats-Unis pourraient être contraints de lui réallouer des ressources politiques et militaires. Soumis à des pressions extérieures (terrorisme, migrants, Russie) et au doute existentiel (Brexit, asymétrie franco-allemande, populisme), le projet européen est aujourd’hui sous haute tension. Dans son discours à Varsovie au sommet de l’Otan, Barack Obama a déclaré que l’Europe pouvait « toujours » compter sur les Etats- Unis. Cent ans après l’entrée en guerre des Etats- Unis en Europe comme « puissance associée », cette promesse raisonne comme un écho hisorique et durable.