Publié le 30/03/2017

Julien NOCETTI, cité par Lucie Bras dans 20 Minutes

Après les Etats-Unis, la Russie est-elle en train de s’attaquer à la politique française ? C’est ce qu’a affirmé ce jeudi Richard Burr, le sénateur américain chargé de mener l’enquête sur l’ingérence de la Russie pendant les élections américaines. A moins de trois semaines des élections françaises, l’Amérique donne l’alerte.

« Je pense qu’il est raisonnable de dire, d’après ce que tout le monde estime, que les Russes sont activement impliqués dans les élections françaises », a-t-il déclaré. En pleine campagne présidentielle, la Russie tirerait donc les ficelles de l’élection ? Le Kremlin nie toute intervention. Pourtant, les chercheurs observent des mouvements venus de Russie.

Les « fake news » avant Trump

« C’est assez net », confirme Julien Nocetti, chercheur à l’Institut français des relations internationales (Ifri) et spécialiste de la Russie. « De grands médias d’Etat russes comme Sputnik ou RT produisent un vrai discours en France, en Allemagne et partout où ils sont installés. »

Accusés de diffuser des fausses informations, ces médias financés par la Russie ont été récemment dénoncés par Emmanuel Macron, qui s’estimait victime de diffamation. Ces sites ont pourtant une audience grandissante. « Des gens sur les réseaux sociaux, souvent de bonne foi, citent des informations de Sputnik, soit tendancieuses, soit complètement délirantes. Ils ont inventé les fakes news avant Trump », explique Michel Eltchaninoff, philosophe et auteur de Dans la tête de Vladimir Poutine.

Des fausses informations que la Russie diffuse aussi via des experts et des influenceurs convaincus par l’idéologie du Kremlin. « La Russie cherche des leviers d’influence chez les leaders d’opinion. » Parmi eux, Eric Zemmour, Alain Soral « et même des parlementaires français », assure Julien Nocetti.

Casser l’Union européenne

En cette période d’instabilité en France et en Europe, à l’aube de changements politiques importants, le président russe cherche à étendre son influence. « Selon Poutine, les masses se révoltent dans les pays occidentaux à cause des actes de leurs dirigeants », explique Michel Eltchaninoff. « Son idée pour répondre à cela, c’est que son modèle politique, le poutinisme, a vocation à s’étendre ailleurs. » Ce modèle politique valorise un pouvoir fort, autoritaire et populaire, exalte la fibre nationaliste et maîtrise les relais médiatiques. Une idée du pouvoir bien différente des démocraties occidentales. Et pour cause.

Le but qu’il poursuit depuis son accession au pouvoir en 2000, c’est « restaurer puis augmenter la puissance russe. Il considère que la Russie, depuis plusieurs siècles, a toujours été empêchée d’exercer le rôle international qu’elle devrait exercer », souligne Michel Eltchaninoff. Après l’annexion de la Crimée et la gestion des négociations avec la Syrie, Poutine touche à son but : « Il veut casser l’Union européenne, c’est son objectif final, pour achever ces démocraties qu’il trouve décadentes et étendre l’influence russe sur l’Europe. »

Le leader russe a déjà affiché publiquement ses préférences concernant les élections françaises, envers François Fillon, qu’il tutoie et Marine Le Pen, qu’il a reçue au Kremlin la semaine dernière.

 

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