22
sep
2021
Espace Média L'Ifri dans les médias
Marc JULIENNE, Céline PAJON, cités par Annissa Hammadi pour Le Parisien.

Crise des sous-marins : pourquoi l’Australie a-t-elle si peur de la Chine ?

Depuis 2017, rien ne va plus entre l’Australie et la Chine. La deuxième puissance mondiale multiplie les gestes d’intimidation, au point d’avoir poussé l’Australie à se placer sous la protection des Etats-Unis. Au détriment de son autre allié dans la région, la France.

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Dans l’affaire des sous-marins, la Chine est nulle part et partout. Les Australiens parlent de « changement de besoin », de « graves réserves » sur les capacités du sous-marin français à répondre à leur « intérêt stratégique » pour expliquer l’abandon de la méga commande à Naval Group. Derrière ces éléments de langage, l’obsession de faire le poids face à la Chine est à peine voilée. La deuxième puissance mondiale n’a jamais caché ses ambitions : devenir la première. Son attitude offensive envers l’Australie ces dernières années, et plus particulièrement ces derniers mois, expliquerait pourquoi le pays-continent s’est réfugié dans les bras de son grand frère protecteur, les États-Unis, pour s’armer.

Car l’Union européenne, avec la France en tête de proue, et les États-Unis partagent deux visions complètement différentes de la zone indopacifique (dont les contours varient eux aussi en fonction de chaque pays et de leurs intérêts). Du côté des États-Unis, le concept de zone libre, contre la Chine, prime. La France et l’Allemagne, elles, défendent un principe plus inclusif de l’Indopacifique : pas contre, mais avec.

« Les Australiens cherchaient certainement une réassurance de sécurité dans la région que les États-Unis pouvaient leur offrir », analyse Jean-Pierre Maulny, directeur adjoint de l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques). Mais pourquoi craint-elle autant la Chine ?

Leur relation a pris un mauvais virage en 2017. La presse révèle de multiples scandales d’ingérence, d’espionnage, de connivences entre hommes politiques chinois et australiens. L’Australie découvre que la Chine mène une politique extrêmement intrusive dans ses affaires.

« C’était vraiment une stratégie structurelle pour infiltrer les milieux industriels, économiques, politiques et culturels, énumère le chercheur Marc Julienne, responsable des activités Chine à l’Ifri (Institut français des relations internationales). On a vu des milliardaires chinois très proches de ministres australiens. »

Le réveil des «vieux démons du péril jaune»

Cette prise de conscience s’est traduite par une politique beaucoup plus ferme à l’égard de Pékin. Depuis, leurs liens n’ont cessé de se dégrader.

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Le Covid n’a rien arrangé. L’Australie a « commis la maladresse », selon David Camroux, de demander haut et fort une enquête indépendante sur les origines du Sars-CoV-2. La Chine a tout de suite réagi en décrétant un embargo sur plusieurs produits australiens (charbon, bœuf, vin, bois).

À partir de ce moment-là, un pas est franchi, estime Céline Pajon, chercheuse au centre Asie de l’Ifri. « L’Australie a commencé à changer d’attitude, et à se rapprocher de la posture américaine, qui est davantage dans la confrontation vis-à-vis de la Chine ».

La « menace » chinoise gagne aussi les eaux. Aussi immense soit-il, le pays est dépourvu d’accès libre aux océans Pacifique et Atlantique. Il est confiné derrière une barrière d’îles : la péninsule coréenne, Taïwan, l’archipel japonais, puis les Philippines, l’Indonésie… Il n’a accès qu’à la mer de Chine méridionale et orientale.

« Sa stratégie navale consiste à contrôler intégralement ces espaces, pour être capable de se défendre contre une éventuelle agression », explique Marc Julienne.

C’est pourquoi la Chine militarise doucement, mais sûrement, ces eaux, ainsi que des îles qui ne lui appartiennent pas et ses propres garde-côtes, en février dernier. Au mépris des règles internationales.

« La stratégie chinoise est celle du grignotage et du fait accompli, souligne Céline Pajon. Elle avance petit à petit. Au bout du compte, elle arrive à prendre pied sur un espace important. »

Récemment, la Chine a annoncé que tous les bateaux qui passeraient en mer de Chine méridionale devraient s’annoncer. Une pratique contraire au droit international de la mer, car ces eaux ne sont pas les siennes.

« Elle cherche à changer les règles du jeu. Son extension va jusqu’au Pacifique Sud, où elle exerce une influence grandissante auprès de petites îles-Etats de la région, comme les îles du Vanuatu. » souligne Céline Pajon.

La France a elle aussi de quoi s’inquiéter : la Nouvelle-Calédonie, qui attend un référendum sur son autodétermination le 12 décembre, n’échappe déjà pas à l’entreprise d’influence de la Chine.

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Mots-clés
Australie Chine Indo-Pacifique