25
sep
2019
Espace Média L'Ifri dans les médias
Laurence NARDON, interviewée par Thibaut Chevillard pour 20 Minutes

Procédure d'impeachment : « Donald Trump pourra jouer au martyr et convaincre sa base de rester à ses côtés »

Pour Laurence Nardon, responsable du programme Amérique du Nord de l'Ifri, la procédure de destitution de Donald Trump lancée par les démocrates a peu de chances d'aboutir.

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Coup de tonnerre à Washington. Les démocrates ont lancé, ce mardi, la première étape d’une mise en accusation solennelle de Donald Trump, soupçonné d’avoir demandé au président ukrainien d’enquêter sur son rival politique Joe Biden. Il s’agit d’une procédure rare et explosive qui a toutefois peu de chances d’aboutir à la destitution du président américain. Mais elle représente l’attaque la plus frontale contre le milliardaire républicain depuis qu’il a été élu président il y a trois ans.

Pour comprendre ce qu’il se passe de l’autre côté de l’Atlantique, 20 Minutes a posé quelques questions à Laurence Nardon, responsable du programme États-Unis à l’Ifri (Institut français des relations internationales).

Cela faisait un moment que les démocrates envisageaient d’utiliser cette arme….

Avant même l’intronisation de Donald Trump, les démocrates parlaient déjà d’utiliser une procédure d’impeachment en raison des soupçons de collusion du président américain avec la Russie. L’enquête, réalisée par le procureur Robert Muller, n’a pas donné grand-chose et ses conclusions ne suffisaient pas pour lancer une telle procédure. Les démocrates du congrès n’y étaient d’ailleurs pas tous favorables.

Il y a aujourd’hui cette nouvelle affaire concernant le coup de fil au téléphone au président ukrainien Volodymyr Zelensky qu’il aurait passé. Les faits sont suffisamment énormes pour que certains démocrates de la chambre des représentants aient changé d’avis et soient désormais favorables au lancement de cette procédure.

Donald Trump est-il menacé ?

Non, car la procédure se déroule en deux temps. Il y a l’impeachment, qui est une mise en accusation, et qui sera peut-être voté par la chambre des représentants. Pour cela, il faut une majorité simple, or les démocrates sont plus nombreux que les Républicains dans cette chambre. Il faut ensuite que le sénat vote, à une majorité des deux tiers, sa destitution. La chambre haute du congrès est majoritairement républicaine (53 %), donc cette procédure n’a aucune chance d’aboutir.

Cette offensive peut-elle se retourner contre les démocrates ?

Oui, c’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils ont hésité jusqu’à présent à la déclencher. Cela va les accaparer beaucoup trop alors qu’on entre en période électorale, la présidentielle est dans un an. Le risque, c’est que les démocrates du congrès ne se focalisent que sur cette procédure plutôt que de se concentrer sur la campagne électorale durant laquelle est organisée une primaire, sans construire de programme politique pour les candidats. En outre, du côté de l’opinion publique, les démocrates vont être vus comme un parti agressif, obstructionniste, et pas comme un parti cherchant à construire quelque chose de positif pour la population.

Cette procédure, si elle est déclenchée, peut-elle avoir un impact lors de la prochaine élection présidentielle ?

Oui, Donald Trump pourra jouer au martyr et convaincre sa base de rester à ses côtés. Il ne devrait pas avoir de mal car tous les Républicains, même s’ils ne l’aiment pas beaucoup, sont derrière lui. Côté démocrate, cela risque de les détourner de la campagne présidentielle.
 

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Donald Trump Etats-Unis