« On doit se rappeler que l’histoire est tragique »
Où va l’Europe ? Comment remédier à ces maux économiques, politiques qui aujourd’hui menacent fortement le projet européen ? Pour trouver des éléments de réponse à ces questions pressantes, Regard s’est entretenu mi-mai avec Thierry de Montbrial, président-fondateur de l’Institut français des relations internationales (IFRI), et membre d’honneur de l’Académie roumaine.
Regard : La Roumanie a récemment inauguré un bouclier antimissile financé par les États-Unis à hauteur de 800 millions de dollars, et le même type d’infrastructure a démarré en Pologne. La désapprobation de ce bouclier de la part de Moscou est-elle quelque part légitime ?
Thierry de Montbrial : Je n’emploierais pas le mot de légitimité, je ne pense pas que cela soit le terme le plus exact. Ceci dit, y a-t-il aujourd’hui une menace de la Russie post-soviétique contre l’Europe et en particulier contre la Roumanie qui justifie des investissements de cette ampleur ? Personnellement, j’ai quelques doutes. L’URSS était déja un colosse aux pieds d’argile, et on s’est aperçu apres la chute de l’Union soviétique que sa puissance militaire était onsidérablement inférieure a ce que l’on croyait. La Russie d’aujourd’hui est certes un immense pays en termes géographiques, avec une grande histoire et une vraie politique étrangere, mais je ne pense pas qu’il y ait une menace majeure de la Russie sur l’Europe. Les menaces principales ne viennent pas de l’est du continent. Des investissements de cette nature et de cette ampleur me paraissent contreproductifs sur le plan stratégique. Si l’on essaie de se mettre a la place des Russes, ce qui ne veut pas dire qu’on les approuve, on peut comprendre qu’ils perçoivent la posture de l’OTAN comme agressive.
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