Publié le 04/09/2012

Herman SCHWARTZ

La loi Dodd-Frank de 2010 s’efforce de réintroduire une certaine régulation dans le système, cinq ans après les débuts de la crise financière. Le professeur Herman Schwartz explique comment le secteur bancaire américain va continuer à desservir l’économie et le système politique du pays.

Au lendemain du crash financier de 1929 et de la Grande Dépression, le système financier américain s’est régulé de façon relativement efficace : la loi Glass-Steagall de 1933 empêchait la fusion des banques commerciales et des banques d’investissement, ainsi que celle des banques et des assurances. Par ailleurs, les sociétés de prêt hypothécaire prenaient en main les instruments financiers de long-terme (crédits immobiliers et plans d’épargne-retraite), loin des prêts à court terme gérés par les banques, évitant ainsi le décalage des échéances entre actifs.

Mais à force de lobbying, les institutions financières américaines ont obtenu la dérégulation du système. La loi Gramm-Leach-Bliley de 1999 supprime la séparation entre banques et assurances. La loi CFMA de 2000 libéralise la plupart des instruments financiers et autorise les banques à acheter des titres de long terme avec de l’argent à court terme. Actifs et produits dérivés se sont multipliés, générant d’immenses profits sur des bases en réalité très précaires. Lorsque les spéculations immobilières ont fini par rencontrer le défaut de paiement, la panique s’est propagée à l’ensemble du secteur financier pour donner la crise de 2007-2008.

La loi Dodd-Frank de 2010 s’efforce de réintroduire une certaine régulation dans le système. La règle Volcker prévoit de séparer à nouveau les institutions financières ; la protection des consommateurs sera mieux assurée, notamment grâce à une plus grande transparence sur les risques encourus ; la loi propose enfin un grand nombre d’excellentes dispositions régulatoires sous l’égide du Conseil de surveillance de la stabilité financière (FSOC).

Cependant, le secteur bancaire américain exerce une grande influence non seulement sur les politiques, aussi bien républicains que démocrates (car il finance leurs campagnes), mais aussi sur le système de la Réserve fédérale et sur la plupart des entreprises privées du pays. La loi Dodd-Frank fait donc face à d’intenses efforts de lobbying pour retarder ou affaiblir ses dispositions. Les perspectives d’une application efficace de ses mesures sont assez faibles. Qui plus est, la réduction, aujourd’hui observée, des décalages entre échéances des produits financiers n’est due qu’à la peur d’une nouvelle crise et cette autorégulation ne devrait pas durer.

Dans une analyse lucide et sans concessions, le professeur Herman Schwartz explique comment le secteur bancaire américain va continuer à desservir l’économie et le système politique du pays.

Ce contenu est disponible en anglais : Don't Bank on Change: Finance and Regulatory Reform in the U.S. [1]