Publié le 10/12/2015

Simond de GALBERT

Les attentats du 13 novembre à Paris et l’attaque de San Bernardino du 2 décembre ont ravivé aux États-Unis le fantôme de la menace terroriste.

Les autorités comme l’opinion publique ont été affectées par l’agression subie par Paris, ville que tous connaissent. Le président Obama a insisté lors de la visite de François Hollande à Washington le 24 novembre sur le fait que les Américains étaient « tous Français ». Les Américains ont par ailleurs été pris de court en comprenant que la fusillade de San Bernardino, qui ressemblait à tant d’autres aux États-Unis, relevait en fait d’un mobile lié au terrorisme islamiste même si, à l’inverse de la tragédie parisienne, aucun lien opérationnel ne paraît pouvoir être établi avec l’État islamique.

Comme cela avait été le cas après les attentats de janvier, les observateurs américains ont pointé du doigt les carences politiques et sécuritaires[1] européennes (coopération en matière de renseignement, contrôle aux frontières extérieures de l’espace Schengen, financement du terrorisme, etc.) qui ont facilité la préparation et la conduite des attaques. Une lecture plus centrée sur la France insistera sur les ressorts sociaux conduisant des nationaux à la radicalisation. La vision d’une laïcité française « idéologique »[2], stigmatisant la minorité musulmane et éloignant certains de ses éléments de la République n’est jamais très loin.

Mais il y a aussi une dimension proprement américaine dans l’analyse des derniers événements, qui prend place dans un contexte de crispation sécuritaire. Elle n’emporte pas pour le moment d’évolution pratique dans la stratégie de l’administration, mais les récentes attaques occupent une large place dans le débat public – avec, comme en France, une évidente poussée du populisme –, et s’annoncent comme un des enjeux des présidentielles de novembre 2016.

 

Le retour de l’anxiété sécuritaire

L’opinion américaine a de nouveau peur. C’est ce qui semble ressortir des sondages réalisés après les attaques de Paris. Selon une enquête produite pour le Washington Post et la chaîne ABC[3], 81 % des personnes interrogées jugent probable qu’une attaque terroriste causant la mort d’un grand nombre d’Américains survienne dans un futur proche. Quoique les Américains partagent majoritairement ce sentiment depuis le 11 Septembre, ce chiffre est en forte augmentation par rapport au creux constaté par le même institut de sondage en mars 2011 (63 %). La confiance dans la gestion par l’administration de la menace terroriste est, à l’inverse, en baisse significative : 40 % seulement des sondés l’approuvant (contre 69 % en février 2011).

Le soutien de l’opinion à des opérations militaires au Moyen-Orient se redresse de façon parallèle à la crainte des attentats terroristes : 73 % des Américains soutiendraient un renforcement de la stratégie militaire américaine contre l’État islamique, même si près des deux tiers de cette majorité sont favorables à un rôle de soutien plus que de leadership ; 77 % des Américains interrogés seraient de leur côté favorables aux frappes aériennes et 60 % soutiennent un usage plus intensif de troupes au sol, contre 30 % seulement en juin 2014. Parallèlement, 33 % des personnes sondées soutiendraient même l’envoi massif de troupes au sol.


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[1]. Stephanie Pezard, “France is Right to Stay the Course”, The Rand Blog, 25 novembre 2015, 2015,
disponible sur : <www.rand.org/blog/2015/11/france-is-right-to-stay-the-course.html [1]>.

[2]. Gordon Adams, “France Has Been No Friend to Muslims”, Foreign Policy, 17 novembre 2015, 2015,
disponible sur : <http://foreignpolicy.com/2015/11/17/france-has-been-no-friend-to-muslims [2]>.

[3] Sondage, “Terrorism Fears Rise Post-Paris; Most Back Force, Oppose Refugees”, ABC News/Washington Post, 20 novembre 2015, disponible sur : <www.langerresearch.com/wp-content/uploads/1173a1AfterParis.pdf [3]>.