Publié le 31/01/2016

Elodie ESCUSA

En Afrique du Sud postapartheid, où consommer est à la fois un acte de citoyenneté pour les populations noires autrefois opprimées et une façon d’affirmer son identité, l’épargne semble occuper les marges des pratiques sociales. Pourtant, chez la petite classe moyenne noire émergente des milieux urbains, elle a une place stratégique dans l’économie du ménage et, parce qu’elle est le signe d’une capacité de projection vers le futur, elle est même au coeur de l’identité du « milieu ».

Les pratiques d’épargne sont un exemple de la multi-positionnalité qui caractérise « ceux du milieu » : ces Sud-Africains « ni riches ni pauvres » observés pour cette étude à Johannesburg et Soweto. Entre les contraintes posées par la précarité et la volonté de s’inscrire dans une trajectoire d’amélioration des conditions de vie (pour eux et leurs enfants), nos enquêtés adoptent toute une palette de pratiques stratégiques et n’hésitent pas à « jouer » sur plusieurs tableaux. Ainsi, différents secteurs et canaux sont combinés dans les comportements d’épargne. Nos enquêtés choisissent à la fois le secteur bancaire – donc formel – pour des placements à court terme et/ou à long terme, souvent dans des plans d’investissement éducatifs, et ont recours à des clubs appelés « societies » ou « stokvels » en Afrique du Sud, similaires aux tontines connues en Afrique francophone. Ceux-ci répondent à leur besoin d’épargner tout en ayant une certaine flexibilité et en entretenant des réseaux sociaux (professionnels ou de voisinage).