Publié le 10/05/2016

Stefan AYKUT

L’adoption de l’Accord de Paris en décembre 2015 constitue un succès incontestable pour la diplomatie française, qui a su saisir une fenêtre d’opportunité géopolitique et économique et mener à bien des négociations difficiles. Elle a été secondée dans cette tâche par l’Europe et l’Allemagne. 

Le rapport analyse les conditions de ce succès diplomatique, et répond aux questions stratégiques qu’il pose : l’accord constitue-t-il aussi un succès sur le plan environnemental ? Jusqu’où reflète-t-il les intérêts de la France, de l’Allemagne et de l’Europe ? Comment ces pays pourront-ils peser dans les politiques climatiques post-Paris ?

L’Europe, qui faisait pendant longtemps figure de précurseur dans la gouvernance climatique onusienne, voit aujourd’hui son leadership contesté, puisque le cadre des négociations actuelles a été défini par les deux puissances mondiales du XXIe siècle, les États-Unis et la Chine. L’Accord de Paris résulte de cette nouvelle donne géopolitique et entérine une approche par le bas et non contraignante. Traité universel mais fondé sur un « droit mou », il dessine les limites de ce qui semble actuellement possible dans le cadre onusien. Dans l’ère des politiques climatiques internationales qu’il ouvre, la capacité d’exercer un leadership indirect, fondé sur les politiques nationales, devient centrale. Le point de départ de l’Union européenne est ambigu : elle abrite quelques-uns des pays les plus avancés en termes de déploiement de technologies énergétiques bas-carbone, mais souffre aussi d’un marché de carbone défectueux et d’une fixation des débats sur les questions de sécurité d’approvisionnement. Les transitions énergétiques en cours en Allemagne et en France, au lieu de constituer des freins à la création d’une « Europe de l’énergie », devraient constituer le moteur d’un tel projet, nécessaire pour aborder en bonne position la compétition à venir entre les voies multiples de la décarbonisation au niveau mondial.

Stefan Aykut est politologue et sociologue au Laboratoire interdisciplinaire sciences innovations sociétés (LISIS, INRA/CNRS/UPEM), et chercheur associé au Centre Marc Bloch (CNRS/HU-Berlin).