Publié le 26/11/2018
L'USS antietam 54 et l'USS Ronald Reagan 76 se ravitaillent en mer © US Navy

Mira RAPP-HOOPER

La stratégie indo-pacifique de l’administration Trump constitue une illustration parfaite d’une politique étrangère élaborée par un pouvoir exécutif divisé.

Ayant identifié la compétition avec la Chine comme une priorité en matière de sécurité nationale, et ayant abandonné le « pivot » de l’administration Obama, l’administration Trump a commencé à dessiner les contours de son approche pour un Indo-Pacifique libre et ouvert, sans parvenir toutefois à la transformer en stratégie concrète. Si des efforts (modestes) ont été déployés pour mettre en place une stratégie opérationnelle, le président américain a adopté de son côté une approche essentiellement sino-centrée, mettant l’accent sur le recours à des sanctions punitives et sur la question coréenne. On notera en outre une contradiction flagrante entre les principes fondamentaux qui sous-tendent le concept d’Indo-Pacifique et les convictions du président. Dès lors en matière de politique vis-à-vis de la Chine, deux grands courants de pensée coexistent aujourd’hui, qui ont très peu de chance de converger dans les deux années à venir.

Pour autant la stratégie indo-pacifique n’est pas nécessairement condamnée à tomber dans les oubliettes de l’Histoire. Que l’appellation persiste ou non, les principaux éléments de cette approche ont de bonnes chances d’être repris par une nouvelle administration et sont parfaitement cohérents avec les objectifs plus larges des Etats-Unis dans la région. Bien au-delà de la Maison Blanche, le consensus à Washington est que la concurrence entre les Etats-Unis et la Chine va s’accentuer, et qu’une stratégie américaine holistique s’impose. Toute stratégie future devra selon toute vraisemblance s’appuyer sur les pays alliés et partenaires, souligner l’importance des démocraties, chercher à sécuriser la première chaîne d’îles et l’Asie maritime, et offrir aux partenaires européens plus d’opportunités de s’engager. Cette stratégie se heurtera sans doute à de nombreuses difficultés liées à la volonté des pays de la région de s’aligner sur les objectifs américains, à leur capacité à engager les ressources nécessaires, ou encore à la profonde défiance qu’aura engendrée l’administration Trump. Les pays alliés et partenaires des Etats-Unis doivent toutefois rester convaincus que la stratégie indo-pacifique sera un jour mise en place, c’est pourquoi ils doivent chercher à la développer par eux-mêmes, en attendant le retour d’un leadership américain dans la région.

Ce contenu est uniquement disponible en anglais : The Indo-Pacific Vision in Strategic Limbo: A Foreign Policy Case Study for the Trump Era [1]