Publié le 13/02/2019

Marc-Antoine EYL-MAZZEGA, cité par Vincent Collen dans Les Echos

La compagnie pétrolière saoudienne prévoit d'exploiter des hydrocarbures en dehors des frontières du royaume, une première. La priorité est donnée au gaz.

La plus grande compagnie pétrolière du monde donne le coup d'envoi de son internationalisation. Saudi Aramco ne se focalisera plus seulement sur « la monétisation des ressources du royaume », annonce ce mardi le ministre de l'Energie, Khaled Al Faleh, dans une interview au « Financial Times ». « Désormais, le monde sera le terrain de jeu » de la compagnie détenue à 100 % par l'Etat saoudien, déclare le responsable, qui fut le patron d'Aramco de 2009 à 2015. Autrement dit, la compagnie pourra potentiellement concurrencer les majors comme Exxon, Shell ou Total aux quatre coins de la planète.

La compagnie saoudienne est le numéro un mondial du pétrole, avec une production de plus de 10 millions de barils par jour. Elle s'est déjà internationalisée dans le raffinage et la pétrochimie, avec une présence aux Etats-Unis, en Corée, au Japon ou en Chine. Mais sa production d'hydrocarbures proprement dite reste presque exclusivement basée sur l'exploitation du sous-sol d'Arabie saoudite.

Avec des réserves de 263 milliards de barils qui représentent en théorie plus de soixante années de production, on pourrait penser qu'Aramco n'a aucun besoin de sortir de ses frontières pour assurer son avenir. Mais le royaume est tout juste autosuffisant en gaz, malgré d'ambitieux projets pour développer ses ressources. Et c'est dans ce domaine qu'Aramco compte investir en priorité à l'international, précise Khaled Al Faleh dans le « Financial Times », même s'il ne mentionne aucun projet précis pour l'instant.

Russie, Etats-Unis, Australie...

Aramco a déjà été cité comme partenaire potentiel du projet de gaz naturel liquéfié (GNL) Arctic LNG 2 en Sibérie piloté par le groupe russe Novatek et dans lequel le français Total doit prendre une participation de 10 %. Un tel investissement renforcerait les liens entre Riyad et Moscou alors que les deux capitales coopèrent étroitement pour réguler les prix du pétrole depuis deux ans.

Mais Aramco pourrait aussi participer à des projets de liquéfaction de gaz de schiste aux Etats-Unis. « D'un point de vue géopolitique, l'alliance avec les Etats-Unis prime toujours très nettement sur celle avec la Russie », explique Marc-Antoine Eyl-Mazzega, du Centre Energie de l'Institut français des relations internationales. Dans le « Financial Times », Khaled al Faleh évoque aussi l'Australie, numéro un mondial du GNL.

Gaz de schiste

Les besoins en gaz de l'Arabie saoudite sont en forte croissance. D'abord pour la production d'électricité, en particulier pour faire face aux pics de consommation en été lorsque l'air conditionné tourne à plein régime. Mais aussi pour la pétrochimie, de plus en plus gourmande en dérivés du gaz. Le royaume dispose de vastes réserves de gaz de schiste qui ne sont pas encore exploitées. « S'implanter aux Etats-Unis permettrait à Aramco de mieux connaître ce secteur et celui du GNL », avance Jean-François Seznec, consultant au Global Energy Center de l'Atlantic Council.

Vincent Collen

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