Publié le 28/02/2019

Thomas GOMART, Marc HECKER, (dir.)

Du 23 au 29 mai 2019, plus de 300 millions d’Européens éliront un nouveau Parlement pour un mandat de cinq ans.

Ces élections interviennent dans un contexte de défiance à l’égard de la légitimité et de la réalité de la « démocratie européenne » et de poussée des forces politiques ouvertement hostiles à la continuation du projet européen.

En 2009, lors de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’UE apparaissait comme une des régions du monde les plus stables, de plain-pied dans la mondialisation. Dix ans plus tard, ce n’est plus le cas : elle est en proie à une série de doutes profonds qui menace sa cohésion et interroge sur son avenir.

Composée de 17 textes courts, cette nouvelle étude collective de l’Ifri vise à identifier, de manière synthétique, les principaux enjeux auxquels l’UE est confrontée à court, moyen et long termes au moment où elle apparaît plus fragile que jamais. Il est certain que son délitement, tant de fois annoncé, transformerait les pays européens en acteurs de troisième rang face aux logiques de puissance actuellement à l’œuvre et à l’affaiblissement du multilatéralisme.

 

Cette étude est également disponible en anglais : « European Elections 2019: Structuring the Debate [1] »

 

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SOMMAIRE

L'Europe face aux guerres commerciales, Sébastien Jean

Les négociations sur un accord de libre-échange transatlantique ont monopolisé les débats commerciaux lors de la campagne électorale européenne de 2014, avec des interrogations sur la manière de façonner la mondialisation en cohérence avec les valeurs et les objectifs politiques européens. Cinq ans plus tard, ces débats paraissent bien loin. Le paysage est bouleversé et les enjeux radicalement transformés.

 

Sommes-nous à l'abri d'une nouvelle crise de l'euro ? Julien Marcilly

À première vue, la question semble déplacée tant la dynamique économique récente de l’union monétaire contraste avec celle de l’époque. Après cinq années consécutives de croissance positive du produit intérieur brut (PIB), le taux de chômage de la zone euro est passé de 12 % en 2013 à un peu plus de 8 % en 2018. La croissance des salaires est désormais à un plus haut taux depuis dix ans, tandis que le solde public est quasiment revenu à l’équilibre. Enfin, les avancées en matière de convergence sont manifestes : les écarts-types des taux de croissance et d’inflation nationaux sont à leur plus bas niveau depuis que l’euro a été créé.

 

Les leçons du Brexit, Vivien Pertusot [4]

La saga du Brexit toucherait-elle à sa fin ? À en croire le calendrier officiel, le Royaume-Uni quittera définitivement l’Union européenne (UE) le 29 mars 2019, soit plus de deux ans et demi après le référendum. Pourtant, jamais l’issue du Brexit n’aura paru aussi incertaine. Difficile donc de savoir si le Brexit sera acté fin mars ou reporté. D’ores et déjà, quelles leçons pouvons-nous tirer de cet épisode aussi éreintant qu’imprévisible ?

 

Vers une Europe plus sociale ? Sofia Fernandes

Malgré les avancées récentes, le débat sur l’Europe sociale pâtit toujours de l’absence d’une analyse claire, partagée par tous les acteurs, sur le rôle que doit jouer l’UE dans le domaine social. Bien que les politiques sociales et de l’emploi restent pour l’essentiel des prérogatives nationales, différents arguments appellent au renforcement de l’« Europe sociale ». Quelles sont les priorités d’action pour que l’Europe, perçue comme libérale, renforce son visage social ?

 

Politiques d'asile et d'immigration : l'impasse européenne, Christophe Bertossi [5] et Matthieu Tardis [6]

Depuis 2015, la crise autour de la question migratoire en Europe constitue un basculement inédit dans l’histoire de l’intégration européenne. Cette crise touche à des aspects techniques des politiques migratoires, bien sûr : que faire de Schengen ? Comment réformer Dublin ? Quels partenariats avec les pays tiers ? Mais ces questions ne peuvent pas trouver de réponse si on ne les situe pas au cœur du défi que les Européens ont à relever dans les prochains mois : la mise en œuvre du principe de solidarité entre États membres et la transformation rapide des identités politiques en Europe.

 

L'Europe face au terrorisme, Marc Hecker [7]

Parler de « nouvel euroterrorisme » est sans doute osé, tant l’idéologie qui nourrit la menace d’aujourd’hui – le salafo-djihadisme, même s’il ne faut pas négliger l’hypothèse d’un renouveau du terrorisme d’ultra-gauche ou d’ultra-droite – et les modalités du passage à l’acte diffèrent d’autrefois. Néanmoins, un sentiment commun de danger a émergé et la volonté politique de « faire davantage » au niveau européen pour lutter contre cette menace s’est clairement manifestée. Face au terrorisme transnational, que peut l’UE ?

 

Où en est la défense européenne ? Barbara Kunz [8]

Le volet défense de l’Union européenne (UE) – la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) – a connu des avancées importantes depuis 2016. On peut citer le lancement de la Coopération structurée permanente (PESCO) ou encore la création du Fonds européen de défense. L’UE avance également vers l’établissement d’un quartier général permanent, un projet longtemps bloqué par les Britanniques. Par ailleurs, la Stratégie globale adoptée en 2016 souligne « l’ambition de doter l’Union européenne d’une autonomie stratégique ». Cependant, bien que ces avancées soient réelles, de nombreuses interrogations persistent lorsqu’il s’agit d’assurer la sécurité de l’Europe. Les Européens devront ainsi répondre à au moins quatre questions.

 

La sécurité énergétique de l'Union européenne : entre vieux démons et nouveaux risques, Marc-Antoine Eyl-Mazzega [9]

Les risques et défis liés à la transition énergétique bas-carbone sont plus larges. Avec 30 % d’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables (ENR) dans l’UE, des objectifs rehaussés de déploiement du solaire et de l’éolien, la fermeture programmée des réacteurs nucléaires allemands en 2022, la baisse progressive attendue du charbon, la transformation des systèmes énergétiques selon les « 3 D » – décentralisation, décarbonation et digitalisation – et le déploiement de la mobilité électrique, de nouveaux enjeux apparaissent. Comment réduire les coûts du déploiement des ENR et garantir un approvisionnement électrique à un prix abordable ?

 

L'Europe et le climat : l'heure des choix stratégiques, Carole Mathieu [10]

L’UE prend conscience qu’il lui faut penser sa stratégie climatique sans l’assurance que les autres régions du monde suivront. S’il n’y a pas d’alternative à une action forte sur le plan domestique, l’UE est en droit de s’interroger sur les mesures à prendre pour ne pas dégrader la compétitivité de ces industries. Elle pourrait choisir la voie offensive en conditionnant les accords de libre-échange au respect de l’accord de Paris et à l’impératif de rehausser progressivement les engagements, ou bien privilégier une approche défensive par l’introduction d’une taxe carbone aux frontières.

 

L'Europe restera-t-elle une « colonie numérique » ? Julien Nocetti [11]

La capacité de l’Europe à s’affirmer en « puissance numérique » divise. La lecture d’une Europe « colonie numérique » s’oppose fondamentalement à une approche plus nuancée mettant en avant le volontarisme de l’actuelle Commission européenne en matière de protection des données, de fiscalité numérique et d’intelligence artificielle (IA).

 

Le moteur franco-allemand est-il en panne ? Hans Stark [12]

Le moteur franco-allemand, qui est réel, n’a jamais eu pour vocation de tourner en permanence ni à plein régime. Son rôle ne consiste évidemment pas à dicter des décisions, mais à impulser de nouveaux élans en période de crise permettant de sortir des impasses. Le leadership que l’on attend du couple franco-allemand doit toujours pouvoir agir (et non s’imposer) dans un contexte de prise de décision complexe à l’échelle des 27 (ou des 19 pour l’eurozone). Il doit disposer de ressources réelles, notamment financières et politiques, pour être audible et légitime.

 

Vers une « contre-révolution culturelle » en Europe centrale ? Éric-André Martin [13]

La crise migratoire en Europe a servi de catalyseur aux mouvements populistes des pays du Groupe de Višegrad (V4) depuis 2015 pour parvenir au pouvoir ou renforcer leur assise. Ils ont développé un discours anti-européen, dénonçant les défis à la souveraineté que constituent les décisions de Bruxelles. La fronde qu’ils ont conduite contre les décisions du Conseil européen relatives à la relocalisation des demandeurs d’asile, mais plus encore le refus de la Pologne et de la Hongrie d’accepter la moindre demande sur leur territoire, a ouvert une crise de gouvernance au sein de l’Union européenne (UE).

 

Les relations transatlantiques à l'ère de Trump, Laurence Nardon [14]

Les États-Unis et l’Europe vont-ils maintenir leur lien privilégié fondé sur des valeurs communes ? La mondialisation et les évolutions démographiques entraîneront-elles au contraire un éloignement inexorable des deux rives de l’Atlantique ? Côté européen, ce débat fort ancien donne lieu à des interrogations angoissées, les nations du Vieux Continent craignant un éloignement des États-Unis qui affaiblirait leur influence et leur sécurité.

 

 L'Union européenne à l'épreuve russe, Tatiana Kastouéva-Jean [15]

En dépit du discours sur le « partenariat stratégique » entre la Russie post-soviétique et l’Union européenne (UE), les rapports entre ces deux « partenaires » n’ont jamais été faciles. La régularité des sommets (deux fois par an) et la densité des mécanismes de coopération (dont les quatre espaces communs ou le Partenariat pour la modernisation) n’ont pas pu prévenir la dégradation de la relation qui a suivi l’annexion de la Crimée. L’UE a imposé des sanctions à la Russie qui a répondu par l’embargo sur les importations d’une grande partie des produits agroalimentaires européens. Les listes des griefs réciproques ne cessent de s’allonger depuis. Les déceptions sont profondes et la confiance est rompue. Aucune des deux parties n’est prête à reconnaître ne serait-ce qu’une partie de sa responsabilité et estime que c’est à l’autre d’assouplir sa position.

 

L'Europe face à la Chine, Alice Ekman [16], Françoise Nicolas [17], John Seaman [18]

Alors que les tensions entre Chine et États-Unis se renforcent, Pékin tente de se rapprocher de l’Europe. Une offensive de charme a été lancée depuis près d’un an à l’égard de nombreux États membres, y compris la France. La communication officielle chinoise évoque l’existence d’un « triangle stratégique États-Unis – Chine – Europe », en soulignant les points de divergence entre les États-Unis et l’Europe, et en insistant sur les points de convergence entre la Chine et l’Europe.

 

Union européenne-Turquie : changement de ton, Dorothée Schmid [19]

Si la perspective de l’adhésion turque bat aujourd’hui de l’aile – la majorité des États membres de l’UE se prononçant désormais contre, tandis que l’euroscepticisme domine en Turquie –, la relation turco-européenne a pris de l’importance et ressurgit comme un questionnement géopolitique majeur. Les rapports entre Turquie et UE combinent depuis l’origine – le traité d’Ankara de 1963 qui pose les bases d’une coopération permettant à terme de faire entrer la Turquie dans le groupe européen – la problématique de l’identité du projet européen, celle des frontières physiques de l’UE et, par dérivation, celle des alliances extérieures de l’Europe.

 

Union européenne-Afrique : la centralité de la question migratoire, Alain Antil [20]

Depuis le sommet euro-africain de La Valette, en novembre 2015, les questions migratoires occupent une place centrale dans la relation entre les deux continents. Ce sommet débouche sur un plan d’action qui prévoit une cogestion des flux migratoires. Pour ce faire, les partenaires s’engagent à combattre les migrations irrégulières et les mobilités forcées, à renforcer la possibilité de migrations et mobilités légales, tout en protégeant les droits humains des migrants et en s’attaquant aux « causes profondes des migrations ».