Publié le 17/07/2019
Commandant Miho Otani, première femme commandant d'un destroyer japonais. Crédits: ministère de la Défense du Japon

Eric SEIZELET

Depuis plusieurs années, les Forces d’autodéfense japonaises (FAD), comme la plupart de leurs homologues étrangères, ont amorcé un lent mais constant processus de féminisation, auquel le gouvernement Abe entend donner une nouvelle impulsion.

Après avoir dressé un état des lieux de la place des femmes dans les FAD, non seulement sur le plan quantitatif, mais aussi qualitatif, par l’analyse du processus gradué d’ouverture aux femmes des métiers et des spécialités des FAD, l’article montre que cette tendance à la féminisation, au-delà du discours officiel sur la nécessaire promotion des femmes dans la société japonaise, participe à une démarche de préservation de l’institution militaire face aux défis démographiques et géopolitiques. Il examine également les procédés de communication sophistiqués pour convaincre les femmes de rejoindre les FAD, par l’utilisation des supports de la culture populaire (posters, mangas, internet, cinéma…).

Toutefois, ce mouvement de féminisation se heurte à de nombreuses difficultés car, outre les aménagements spécifiques des bases pour assurer la cohabitation des sexes sur le lieu de travail, il bouleverse les assignations traditionnelles en matière d’emploi et oblige à repenser, en termes nouveaux, la conciliation entre vie de famille et vie professionnelle. L’accès aux postes de commandement reste limité et l’ouverture aux femmes des fonctions combattantes controversée ; les mouvements féministes sont réticents face à une entreprise de « légitimation » des FAD ; l’institution militaire demeure partagée entre les contraintes démographiques qui poussent à une féminisation accrue des FAD, et le souhait inavoué de la contenir pour maintenir leurs capacités opérationnelles et préserver l’un des derniers bastions de la prééminence masculine.