Publié le 23/09/2019

Laurence NARDON, citée par Gilles Sengès dans l'Opinion. 

En demandant au Président ukrainien d’enquêter sur les affaires du fils de l’ancien vice-président américain, l’hôte de la Maison Blanche anime les primaires démocrates.

Suite aux révélations selon lesquelles Donald Trump aurait fait pression sur son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky afin d’obtenir des éléments supposés compromettants sur Joe Biden et son fils, l’opposition démocrate demande la retranscription de la communication téléphonique entre les présidents des Etats-Unis et d’Ukraine ainsi que la publication du rapport du « lanceur d’alerte » américain à l’origine de l’affaire.


Comme en 2016 où il avait sollicité l’aide de Moscou pour retrouver les courriers électroniques « effacés » de Hillary Clinton, Donald Trump a récidivé cet été en demandant à Volodymyr Zelensky, le nouveau président ukrainien, d’enquêter sur les affaires réalisées dans son pays par Hunter Biden, le fils de Joe Biden, candidat à l’investiture démocrate pour l’élection présidentielle de novembre 2020. Sauf que l’intéressé est installé, aujourd’hui, à la Maison Blanche et que ses conversations téléphoniques sont écoutées par toutes sortes de services. Et que c’est par le biais d’un Américain « lanceur d’alerte » que sa manœuvre a été dévoilée, suscitant un tollé à Washington où certains responsables démocrates veulent déjà lancer une procédure d’impeachment (mise en accusation).


« C’est un épouvantail que l’on agite depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche », relativise Jean-Eric Branaa,  maître de conférences à l’université de Paris II-Assas. « Vue la configuration du Congrès américain avec les républicains majoritaires au Sénat et les démocrates à la Chambre des représentants, cela ne peut pas se faire. D’autant que les démocrates sont divisés sur la question. Ce n’est qu’une péripétie de campagne », poursuit le spécialiste des Etats-Unis. « C’est une affaire qui serait importante pour tout autre président mais pas pour Donald Trump qui n’a pas de limites. On sait qu’il agit à la présidence comme un mafieux en mélangeant les genres entre sa fonction, les liens de famille et sa campagne électorale », abonde Laurence Nardon, chercheur, responsable du programme Amérique du Nord de l’institut français des relations internationales (Ifri).
Aucun cadeau. Paradoxalement, l’affaire pourrait jouer en faveur de Joe Biden, grand favori chez les démocrates. « Depuis le début de la primaire qui oppose une petite vingtaine de candidats, Donald Trump instillait ses critiques de manière égale. Ce qui était une manière de ne pas cristalliser l’attention sur l’un ou l’autre », continue la spécialiste. « Ce qui se passe maintenant peut donc privilégier Biden alors que le champ semble se réduire à un choc avec Elizabeth Warren qui a clairement dépassé Bernie Sanders », estime Laurence Nardon. La spécialiste s’attend à ce que l’hôte de la Maison Blanche s’attaque maintenant à celle qu’il a surnommée « Pocahontas » pour avoir usé par le passé de racines amérindiennes dans sa carrière professionnelle, discrimination positive aidant.


« Donald Trump a tout intérêt à jeter le discrédit sur l’ancien vice-président qui est le candidat qui l’ennuie le plus », explique Jean-Eric Branaa auteur de Joe Biden, le troisième mandat de Barack Obama, à paraître le 4 octobre (ed. VA Press). « Tout cela nous promet une campagne où on ne se fera aucun cadeau. On était dans le caniveau en 2016, là on va sans doute descendre encore plus bas », pronostique-t-il. Même si, comme le souligne Laurence Nardon, le pays a de grandes chances de voir trois septuagénaires en campagne jusqu’au printemps prochain entre Trump, Biden et Warren !

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