Publié le 13/10/2019

Nele Katharina WISSMANN, citée par Julien Vallet sur RFI

Le drame de Halle, au cours duquel deux personnes ont été assassinées cette semaine, est le dernier d’une longue série d’actes violents commis par des individus ou des groupuscules d’extrême droite dans un pays, l’Allemagne, et une région, l’Est du pays, où l’extrême droite semble progresser dans les esprits et les urnes.

Stupeur en Allemagne où une fusillade aux abords d’un restaurant turc et d’un cimetière juif a fait deux morts, mercredi, dans la petite ville de Halle, dans l’est du pays. L’auteur de la tuerie est un jeune homme de 27 ans, marginal et solitaire, qui nie la réalité de la Shoah. Dans la vidéo qu'il a diffusé en direct, on l'entendait insulter les Juifs. En juin, déjà, le sang avait coulé dans le pays : un élu CDU, Walter Lübcke, préfet de Cassel, connu pour ses positions pro-migrants, avait été assassiné par un néonazi.

En parallèle de ces violences, l'extrême droite progresse dans les urnes : début septembre, le parti Alternative für Deutschland (AfD) remportait 28 % des suffrages aux élections locales en Saxe, la région où se situe Halle. L’Allemagne, que l’on croyait vaccinée contre le danger extrémiste au vu de son passé, est-elle confrontée au retour d’une extrême droite particulièrement violente, en particulier à l’Est ?
 

Stigmates du Mur

Le choc de la chute du mur de Berlin et la fracturation industrielle qui s’en est suivi sont souvent avancés comme une raison d’un fort mécontentement qui aurait nourri une résurgence de l’extrémisme. Après la réunification, un certain nombre d’industries sont passées à l’Ouest, par exemple. Pourtant, les différences de taux de chômage sont désormais assez faibles entre Est et Ouest, rappellent les spécialistes du pays : à 3,1 % pour l'ensemble de l'Allemagne en août dernier.

Pour Patrick Moreau, chercheur au Laboratoire Dynam de l’Université de Strasbourg et auteur de « L’Autre Allemagne – Le réveil de l’extrême droite » (Vendémiaire, 2017), l’AfD remporte surtout les faveurs d’un électorat protestataire, assez peu idéologisé, qui conteste avant tout les partis établis. [...]

 Après la réunification, ils ont eu « l’impression d’être intégrés à un autre État, d’être dépossédés, explique Nele Wissmann, chercheuse associée à l’Ifri. Que l’AfD fasse de bons scores chez les jeunes signifie que ce sentiment est même passé à la génération suivante, qui n’a pas connu le Mur ». « Il s’agit plus de quelque chose de ressenti que de réel, poursuit-elle. À l’Est, les leaders de l’AfD, pourtant tous originaires de l’Ouest, jouent sur un sentiment de défiance envers les partis établis et l’idée que la réunification a échoué. »

Tous les observateurs rappellent également que l’extrême droite n’a en réalité jamais complètement disparu en Allemagne, et ce des deux côtés du rideau de fer. Il existait ainsi une scène nénonazie assez active en RDA dans les années 1980, dès avant la chute du Mur de Berlin, mais minoritaires et évidemment peu médiatisées. Car pendant les quelques quarante-cinq de vie de l’ex-RDA, les Allemands de l’Est ont vécu avec un mythe assez proche du « résistantialisme » cher au général de Gaulle en France : selon l’idéologie communiste en vigueur, le peuple composé de paysans et d’ouvriers avait résisté à l’idéologie nazie. [...]

 

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