Publié le 18/06/2020
Moscou, défilé du "Régiment immortel", mai 2016

Tatiana KASTOUEVA-JEAN, (dir.) , Olga KONKKA, Nikolaï KOPOSOV, Emilia KOUSTOVA, Denis VOLKOV, Tatiana ZHURZHENKO

Sous les présidences de Vladimir Poutine, la mémoire historique est devenue un outil essentiel de légitimation politique.

Non seulement le président russe s’y intéresse de près, mais il est même l’un des principaux auteurs du récit historique officiel. Ses autres contributeurs sont pour l’essentiel des hommes politiques de premier plan dont plusieurs siloviki, issus des structures des forces de l’État russe. L’Église orthodoxe russe participe aussi activement à cette entreprise historiographique. La recherche menée par des historiens n’est pas pour autant interdite ou systématiquement entravée ; cependant, les autorités cherchent à encadrer le discours historique dominant, avec un double objectif : d’une part, consolider l’identité et l’unité nationales, ébranlées par la chute de l’Union soviétique et les années de transition, en stimulant le patriotisme et en promouvant une vision positive du passé ; d’autre part, renforcer la loyauté de la société envers l’État. En outre, depuis 2014, le discours sur la mémoire historique est ajusté au contexte de confrontation avec l’Occident et l’Ukraine post-Maïdan. Pris en étau entre les pressions internationales et le besoin de renforcer une légitimité qui s’effrite, entre la crise économique et la gestion de la pandémie du COVID-19, le Kremlin n’a pas fini de recourir à l’instrumentalisation de cette mémoire.