Publié le 30/10/2020

Laurence NARDON, interrogée dans Le Soir.

En quatre ans, Trump a remisé le multilatéralisme au placard. Tout en prenant des décisions en matière de politique étrangère dont le parti démocrate pourrait profiter...

[...] S’il est élu, Joe Biden va-t-il réparer tous les dégâts que Trump a causés au multilatéralisme ? Ou le Républicain a-t-il finalement rendu service à la prochaine administration en lui évitant de prendre une décision impopulaire ? « La réponse… c’est un peu les deux ! Parce que le positionnement de Biden, du parti démocrate, est un peu double, analyse Laurence Nardon, responsable du programme États-Unis à l’Institut français des relations internationales (Ifri). Si jamais Joe Biden est élu, il y aura un retour à la manière traditionnelle de faire de la politique étrangère, un retour au multilatéralisme, au respect des institutions internationales, des alliances, comme l’Otan. » [...] « Un tournant à 180 degrés sur les pratiques égoïstes et agressives de l’administration Trump », résume l’experte. Mais cela ne veut pas pour autant dire que Biden reviendra à la méthode Obama. « L’époque a changé !, estime Laurence Nardon. Et Trump a opéré deux changements que les Démocrates vont épouser en cas de victoire : le rapport à la Chine et la politique commerciale. »

[...] « Biden sera plus mesuré, se concertera davantage avec les alliés mais il est clair qu’à Washington, il y a un consensus bipartisan pour être dur avec la Chine, relève l’experte. Avant, on était poli. Et Trump est arrivé comme un chien dans un jeu de quilles et, finalement, il a rendu service à tout le monde. » Même à l’Union européenne : la Commission l’a reconnu en mars 2019, dans un document préparatoire publié par son service diplomatique : la Chine est un « rival systémique », doublé d’un « concurrent stratégique ». « Et avant Trump, on n’osait pas le dire. Si Biden est élu, les Etats-Unis seront toujours aussi exigeants avec la Chine. Et son administration ajouterait un dossier sur la pile : celui des droits de l’homme. Des comptes seront demandés vis-à-vis des Ouïghours, des journalistes emprisonnés. »

Autre sujet sur lequel Biden ne reviendrait pas en arrière : la politique commerciale. « L’époque du libre-échange débridé et heureux est terminée, estime Laurence Nardon. Sur le site de campagne de Biden, c’est clair : Il n’y aura pas de retour au business as usual sur le commerce. Et sur ce point, il est suivi par l’aile gauche du parti démocrate, qui veille au grain. »

Reste que le président Trump, privilégiant les relations bilatérales agressives, a durablement entamé la confiance et la crédibilité de son pays. Pour l’experte, « le modèle démocratique américain est aujourd’hui amoché. C’est une alerte pour tout le monde. Ce modèle est abîmé. Et même si Biden a affirmé qu’il ferait tout son possible pour le réparer, quelle confiance apporter à un pays qui peut changer d’avis tous les quatre ans ? Qui est autant polarisé ? »

> Lire l'entretien complet sur le site du journal Le Soir [1].