Publié le 08/01/2021

Laurence NARDON, citée par Virginie Robert pour Les Echos

L’attaque contre le Capitole, symbole de la démocratie américaine, va marquer un tournant dans l’histoire politique du pays. Le lâchage consécutif, et in extremis, de Donald Trump par des républicains influents donne l’occasion d’une refonte des frontières du parti de l’éléphant

Il ne faut pas sous-estimer ce que la date du 6 janvier représentera dans l’histoire de la démocratie américaine. A l’incitation du président des Etats-Unis, une foule de partisans déterminés a forcé son entrée dans le Capitole pour réclamer une victoire prétendue volée. C’est la première fois dans l’histoire du pays qu’une transition de pouvoir n’est pas pacifique. C’est la deuxième fois, depuis que les Britanniques ont brûlé l’édifice en 1814, que ce lieu est ainsi violé. Et il y a eu quatre morts.

  • « S’il ne les a pas organisés, le président a provoqué ces événements. Il y a aussi une responsabilité historique des républicains qui l’ont soutenu dans ses mensonges », observe Laurence Nardon, chercheuse, responsable du programme Amérique de l’Ifri.

Retournement de la dernière heure

C'est seulement mercredi que l'establishment républicain a changé son fusil d'épaule. Ses membres les plus influents, le vice-président américain Mike Pence, le président du Sénat Mitch McConnell [1] , ou encore le sénateur de Caroline du Sud Lindsey Graham « ont fini par préférer la Constitution et la loi à leurs affidés » en se démarquant du mouvement insurrectionnel, constate l'américaniste Anne Deysine, auteur de « Les Etats-Unis et la démocratie ». Un retournement de la dernière heure, à l'extrême limite, alors que le coeur institutionnel du pays était menacé.

Ni le refus de Donald Trump de reconnaître sa défaite en novembre, ni sa campagne d'attaques judiciaires, ni son chantage au gouverneur de Géorgie pour trouver onze mille voix, n'avaient dérouté leur soutien. Et pour cause, le sondage de Yougov souligne que 56 % des électeurs interrogés pensent qu'il y a eu fraude. Plus grave : un électeur sur cinq est d'accord avec les insurgents, dont 45 % de républicains.

Une image déchue

Ces leaders ont pourtant lâché Donald Trump en fin de partie. Plusieurs diplomates et hauts fonctionnaires ont donné leur démission jeudi, ne pouvant cautionner plus longtemps leur présence dans l'administration Trump. Cela augure d'une recomposition du parti républicain qui peut être favorable à Joe Biden puisque le clan de Trump perd des élus influents.

« Maintenant que McConnell n'est plus leader au Sénat, et puisque les démocrates y sont à égalité depuis l'élection de Géorgie, Joe Biden va pouvoir faire approuver les nominations au gouvernement, nommer des juges, faire des réformes », observe Anne Deysine.

Une chance à saisir alors qu'il va aussi falloir redorer le blason des Etats-Unis, terni par ces images qui ont fait le tour du monde [2] .

  • « Le soft power américain, son modèle démocratique, est mis à mal », constate Laurence Nardon.

 

Copyright Les Echos / Virginie Robert

 

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