Publié le 20/09/2021

Paul MAURICE, cité par Daniella Franco sur RFI-Brésil. Article paru en portugais

Angela Merkel quittera son poste de chancelière après les élections générales du 26 septembre. Le dirigeant clôturera un chapitre important de l'histoire de l'Allemagne et de l'Union européenne (UE), laissant un héritage enviable aux chefs d'État et de gouvernement du monde entier.

Après quatre mandats de chancelière et 16 ans à la tête du gouvernement allemand, "Mutti" (maman), comme Mme Merkel est affectueusement appelée en Allemagne, quittera la chancellerie au sommet de sa popularité, élue personnalité politique préférée des Allemands au cours des six dernières années. À 67 ans, elle est considérée comme la femme la plus puissante du monde, pilotant comme peu d'autres le pays le plus peuplé d'Europe - plus de 83 millions d'habitants - l'un des principaux piliers du Vieux Continent.
 
  • "Globalement, l'image qui reste de Merkel est celle de quelqu'un qui a fait son travail. Elle a su gérer son pays et assurer l'Europe pendant plusieurs crises. Elle laissera l'image de la stabilité en Allemagne, où elle a mené des réformes importantes, comme la sortie du nucléaire et l'accueil des migrants. Au niveau européen, elle a accepté la mutualisation de la dette en 2020", explique à RFI le chercheur Paul Maurice, spécialiste des relations franco-allemandes à l'Institut français des relations internationales (Ifri).
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En revanche, les experts s'accordent à dire que parmi les principaux succès de la chancelière figure l'accueil des migrants lors de la crise de 2015.
  • "Alors que de nombreux États européens étaient réticents, Angela Merkel a misé sur une politique humaniste en accueillant des personnes qui fuyaient leur pays, ce qui a également changé l'image de l'Allemagne", explique Paul Maurice.
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Réformes sociales
 
Les autres points acclamés de l'ère Merkel sont les réformes sociales, comme la légalisation du mariage homosexuel en juin 2017, même si, "elle n'a pas voté pour ce projet", rappelle Paul Maurice. Une façon d'aller vers l'avenir, mais sans s'impliquer directement, analyse à Franceinfo Agathe Bernier-Monod, spécialiste de l'Allemagne contemporaine et professeur à l'université du Havre.
 
Ces attitudes "paradoxales", selon Paul Maurice, ont été utilisées par la chancelière en d'autres occasions. En 2012, Angela Merkel a eu recours à la même stratégie pour adopter le projet de salaire minimum défendu par le Parti social-démocrate (SPD), auquel la chancelière elle-même s'était opposée pendant la campagne électorale.
 
Une autre réalisation pour laquelle la chancelière restera dans les mémoires est l'approbation du plan de relance économique en juillet 2020, en raison de la pandémie de Covid-19. Après avoir été critiquée pour sa rigueur lors de la crise de l'euro en 2011, qui a pénalisé l'Irlande, l'Espagne et l'Italie, mais surtout la Grèce, Angela Merkel a su faire preuve de solidarité.
 
Les experts soulignent que l'approbation d'un plan de 750 milliards d'euros visant à créer une dette européenne commune a constitué un changement de paradigme évident pour le chancelier. Pour Paul Maurice, il s'agira d'"une réalisation importante" du dernier mandat de la dirigeantte allemande. 
 
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Défis pour le prochain gouvernement
 
À moins d'une semaine des élections législatives, tout indique que le candidat de Mme Merkel, l'impopulaire Armin Laschet, sera battu par le social-démocrate Olaf Scholz. Outre la lourde tâche de remplacer un dirigeant qui est devenu un pilier de l'Allemagne, le prochain dirigeant devra également relever plusieurs défis.
 
  • "Il est difficile de s'en prendre à quelqu'un qui est devenu le symbole d'un pays, qui est resté au pouvoir si longtemps, qui a été réélu plusieurs fois, qui a une forte représentation internationale. La politique allemande connaîtra sans aucun doute de profonds changements", déclare Paul Maurice.
L'expert affirme qu'au milieu de tant d'incertitudes, il est possible de parier sur d'importantes transformations politiques à l'avenir.
  • "Quel que soit le chancelier, il y aura des changements car les coalitions seront différentes de celles que nous avons aujourd'hui. De plus, le contexte est différent et les défis seront différents."
Pour Paul Maurice, celui qui prendra la tête de l'Allemagne devra faire face à des enjeux tels que le changement climatique, le numérique et surtout les mutations industrielles.
  • "Il ne sera pas possible de rester dans une politique d'exportation massive dépendante des Chinois. Il faudra s'adapter car la Chine produit aussi ses propres technologies", ce qui pourrait avoir des conséquences importantes pour l'Allemagne, conclut le chercheur de l'Ifri.

 

>> Lire l'article original paru en portugais (Brésil) sur le site de RFI : « Merkel se prepara para deixar o poder após 16 anos à frente da Alemanha​ [1]  [1]» <<