Publié le 27/09/2021

Marie KRPATA , citée par Margaux Otter dans L'OBS

Olaf Scholz, leader du parti social-démocrate, et Armin Laschet, dirigeant de la CSU-CDU, ont tous deux affirmé leur ambition de devenir chancelier. Les négociations devraient durer au moins jusqu’à Noël.

La formation du nouveau gouvernement allemand se fera-t-elle en un mois, comme en 2009, ou prendra-t-elle 172 jours, comme en 2017 ? Alors que ce lundi 27 septembre, la commission électorale fédérale d’Allemagne a annoncé la victoire du parti social-démocrate (SPD), un nouveau défi se pose, et pas des moindres : constituer un gouvernement et élire un chancelier.

Les deux principales formations sont arrivées dans un mouchoir de poche. Selon un décompte provisoire, le SPD, parti d’Olaf Scholz, a remporté 25,7 % des suffrages. Un léger avantage sur le camp conservateur de la CDU-CSU, dirigé par Armin Laschet, qui a recueilli 24,1 % des voix (le plus mauvais résultat de son histoire). Loin derrière, les Verts arrivent en troisième position (14,8 %), suivis par le parti libéral FDP (11,5 %), le parti d’extrême droite AfD (10,3 %) et la gauche radicale Die Linke (4,9 %).

Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, ni le SPD ni la CDU n’ont réussi à réunir plus de 30 % des suffrages. D’où la nécessité d’un accord tripartite pour obtenir la majorité au Bundestag, le Parlement allemand. « Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour former un gouvernement sous le leadership de la CDU/CSU », a clamé Armin Laschet dimanche soir devant ses supporters. « Les citoyens veulent un changement », a pour sa part déclaré Olaf Scholz sur la chaîne de télévision ARD. « Ils veulent que le prochain chancelier soit le candidat du SPD. »

Une fin de concertation « avant Noël »

Plusieurs scénarios de coalitions sont aujourd’hui sur la table. D’abord, une alliance « jamaïcaine » (vert, jaune, noir) entre les Verts, les libéraux du FDP (en jaune) et les conservateurs de la CDU (en noir). 

  • « Ce type de coalition est possible, mais cela signifierait l’absence du parti gagnant des élections, le SPD », indique Marie Krpata, chercheuse au Comité d’études des Relations franco-allemandes (Cerfa), qui rappelle qu’en 2017 déjà, « ce type de négociations avaient échoué ».
  • Autre possibilité, celle de la présence au gouvernement du SPD, du FDP et des Verts. C’est ce que la chercheuse définit comme une coalition « feux tricolores ». Mais les différences idéologiques entre les trois formations politiques, notamment « sur les questions de l’imposition, de la dette et du déficit » pourraient faire barrage.

La troisième et dernière option reste celle choisie lors des précédentes élections législatives, en 2017 : une « grande coalition » des deux principaux partis, le SPD et la CDU-CSU. Si, selon les sondages, elle obtiendrait une petite majorité au Parlement, l’option est pour l’instant rejetée par le SPD.

Olaf Scholz comme Armin Laschet souhaitent que la concertation aboutisse « avant Noël »« Et j’espère bien avant », complète le leader du SPD. Mais les pourparlers s’annoncent ardus et la balle est dans le camp des petits partis. 

  • « Les deux leaders ont la même ambition. Les négociations vont certainement durer jusqu’à la fin de l’année, voire le début d’année prochaine », explique Marie Krpata. D’autant plus qu’une coalition tripartite « serait du jamais-vu au niveau fédéral ».

Merkel par intérim

Ce qu’il faut éviter à tout prix (sur ce point, tous les partis sont d’accord), c’est une répétition des interminables négociations qui avaient suivi le scrutin de 2017. Pendant des mois, l’Allemagne était restée sans gouvernement.

  • « Il avait fallu six mois pour arriver à un accord sur une grande coalition », la GroKo, rappelle Marie Krpata.

Difficile, en tout cas, d’affirmer à ce stade qui succédera à Angela Merkel. « Scholz est très légitime pour devenir chancelier, indique la chercheuse. Pendant la campagne, il a su éviter les erreurs, incarner la sérénité et la stabilité. » Au contraire, Armin Laschet s’est illustré par quelques scandales et « bad buzz » : lors d’une cérémonie en hommage aux victimes des inondations en Rhénanie et Nord-Westphalie en juillet dernier, le chef de file des chrétiens-démocrates a été filmé pris d’un fou rire. Quelques jours plus tôt, il avait répondu à une journaliste en utilisant le terme « jeune femme » sur la chaîne régionale WDR, un terme jugé paternaliste et sexiste. 

  • « Dans ces négociations, il joue sa carrière politique », analyse Marie Krpata.

En attendant la désignation d’un chancelier, c’est Angela Merkel qui assurera, par intérim, les affaires courantes. Après avoir égalé le nombre de mandats d’Helmut Kohl, elle est ainsi en passe de battre un autre record, celui de la longévité au pouvoir. Pour cela, il faudra qu’elle reste cheffe du gouvernement plus de 5 870 jours, soit jusqu’au 17 décembre. Une échéance qu’elle risque fort d’atteindre.

 

>Voir l'article sur le site de L'OBS [1]