Publié le 08/03/2022

Tatiana KASTOUEVA-JEAN, citée par Mayeul Aldebert pour Le Figaro

Pris en étau entre Moscou, à qui il doit son maintien au pouvoir, et une opinion publique contestataire, le président biélorusse Alexandre Loukachenko n'a pas de marge de manœuvre.

Ces derniers jours, cependant, les opposants biélorusses au pouvoir n'ont cessé d'alerter sur une attaque imminente de la Biélorussie au côté de Moscou. En parallèle, d'autres informations circulent sur la démission d'officiers biélorusses, informations relayées activement par le camp ukrainien sans être confirmées pour autant. La dernière en date serait celle du chef d'état-major et ministre adjoint à la Défense Viktor Gulevich. Dans une lettre datée du 4 mars, mais non authentifiée, l'officier biélorusse aurait évoqué le refus massif des soldats de se battre en Ukraine. Cette démission a été toutefois démentie par le ministère biélorusse de la Défense, selon l'agence de presse Interfax.

«Cette lettre a pu être fabriquée, mais les démissions au sein de l'armée, si elles étaient avérées, ne seraient pas étonnantes», commente Carole Grimaud Potter, professeur de géopolitique de la Russie à l'Université de Montpellier et à l'Institut diplomatique de Paris.

 

  • «Que ce soit les partisans de Loukachenko, ou ses adversaires, dans la société et les élites, un consensus se dégage qu'il est désastreux de participer directement à la guerre», ajoute Tatiana Kastouéva-Jean, directrice du Centre Russie à l'Ifri. Et pour cause, «les positions biélorusses ont été fragilisées face à Moscou depuis les élections falsifiées d'août 2020 (qui ont reconduit le président au pouvoir, NDLR)», explique la chercheuse. Et le sentiment de souveraineté biélorusse compte beaucoup dans la population.

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Problèmes de coordination

À cela s'ajoutent les problèmes de coordination que pourraient rencontrer les deux armées sur le front.

  • «Les Russes ont déjà du mal avec leur logistique et communication. Ajouter le facteur biélorusse dans cette opération, peut s'avérer difficile à gérer», affirme Tatiana Kastouéva-Jean.

Sur cette question précise, à l'exception des derniers exercices conjoints de février, l'armée biélorusse manque cruellement d'entraînement.

Malgré ces insuffisances, «un fort degré de loyauté demeure chez les parachutistes et les forces spéciales», avance Joseph Henrotin. Minsk prendra-t-elle le risque pour autant d'engager ces unités dans «l'opération militaire spéciale» de Moscou en les éloignant du pouvoir fragile de Loukachenko ?

La carte d'une intervention biélorusse appartient plus que jamais à Vladimir Poutine. Mais de son côté, le président russe voudra sans doute préserver ce qui apparaît de plus en plus, comme une première étape acquise de la réunion des trois Russies.
 

> L'article en intégralité sur Le Figaro [1].