Publié le 27/04/2022

Julien NOCETTI, cité par Matthieu Suc pour Médiapart

Jusqu’ici envisagés comme un moyen de propagande, le téléphone portable et les réseaux sociaux sont utilisés par les services ukrainiens pour collecter du renseignement opérationnel qui explique les nombreuses embuscades dans lesquelles est tombée l’armée russe.

Bogdan, un bûcheron de 28 ans, son frère et trois autres jeunes du village de Termakhivka, à 100 kilomètres au nord de Kyiv (Kiev), ont passé 13 jours et 13 nuits dans un trou, les mains liées et les yeux bandés. «Les soldats sont venus nous chercher le 17 mars, ils nous ont accusés de donner leurs positions aux Ukrainiens», avait-il raconté à Mediapart.

Depuis que l’armée russe a battu en retraite pour se concentrer sur la conquête du Donbass, les témoignages se multiplient, venus des territoires libérés, racontant peu ou prou la même chose: des troupes de l’envahisseur qui, sitôt arrivées dans un village, épluchaient les téléphones portables des habitants et, souvent, les cassaient. L’objet de consommation et de communication le plus répandu au monde est devenu la hantise du militaire russe, tant il est la cause de ses défaites.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie va fournir de nombreuses leçons à tirer aux stratèges et chercheurs de la chose militaire, en particulier en ce qui concerne la manière dont les armées opèrent dans un environnement de médias sociaux. Depuis longtemps, on prêtait une expertise en la matière à la Russie qui a théorisé la «guerre hybride». Chercheur à l’Institut français des relations internationales (Ifri), Julien Nocetti y avait consacré en 2015 un rapport intitulé « Guerre de l’information: Le web russe dans le conflit en Ukraine [1] ». Seulement l’action sur les réseaux sociaux était envisagée comme un amplificateur d’un discours politique accompagnant une action militaire. On n’imaginait pas à quel point le téléphone portable pouvait influer sur le terrain des opérations lui-même, en fournissant un renseignement opérationnel en quantité.

 

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