Publié le 10/11/2022
Une locomotive électrique en Ouzbékistan

Michaël LEVYSTONE

Du rétablissement de l’Émirat islamique en Afghanistan par les Talibans à la guerre en Ukraine sans oublier le réchauffement climatique, les plus graves crises internationales, qu’elles soient conjoncturelles ou systémiques, impactent de plein fouet la connectivité en Asie centrale, dans les domaines des transports, de l’énergie et de l’eau. 

Si la quête, existentielle au sein des pays de cette région enclavée (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan), de partenariats étrangers se trouve légitimée et même encouragée par le contexte troublé dans lequel ils évoluent, leurs démarches entreprises en ce sens depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022, tiennent à une volonté flagrante de contourner la Russie, lourdement sanctionnée par les Occidentaux.

Ainsi, les réseaux de transport centrasiatiques se développent dans deux directions : vers l’ouest, avec le Kazakhstan et la mer Caspienne comme maillons essentiels des routes commerciales sino-européennes ; vers le sud, que ce soit par la voie maritime (développement de liaisons portuaires du Kazakhstan et du Turkménistan avec l’Azerbaïdjan et l’Iran) ou par la voie terrestre (création d’une ligne ferroviaire entre l’Ouzbékistan, l’Afghanistan et le Pakistan).

Dans le secteur de l’énergie, le Kazakhstan, entravé par les blocages russes de son principal oléoduc, tourne son regard vers la mer Caspienne pour continuer d’acheminer du pétrole vers les marchés européens. Le Turkménistan destine ses exportations gazières aux marchés chinois et sud-asiatiques, où ses projets, mais aussi ceux du Kirghizstan et du Tadjikistan en matière d’hydro-électricité, sont entravés par les évolutions de la situation en Afghanistan.

Enfin, la question de l’eau met en lumière le paradoxe de pays interdépendants et divisés, entre ceux ayant la main sur les ressources hydriques de l’Asie centrale (Kirghizstan et Tadjikistan) et les autres, situés en aval du Syr-Daria et de l’Amou-Daria (Kazakhstan, Ouzbékistan et Turkménistan). Si les initiatives se multiplient en faveur d’une gestion intelligente des importantes ressources hydriques de la région, ce sujet reste le plus clivant en Asie centrale, en dépit de l’urgence qu’il revêt.

Michaël Levystone est chercheur associé au Centre Russie/NEI, pour lequel il travaille sur les républiques d’Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan) et sur la politique étrangère de la Russie.