Publié le 15/06/2011

Jacques LESOURNE

La politique européenne de l’énergie dont les Etats et les autorités européennes étaient si fières est en train de tomber dans le chaos.

La décision allemande de sortie rapide du nucléaire va achever de cliver l’Europe en deux groupes d’Etats, l’un avec le nucléaire, l’autre sans. On peut en attendre un élargissement de la gamme des prix de l’électricité pour les usagers au sein du marché intérieur, la nécessité - transitoire - pour l’Allemagne d’augmenter sa production d’électricité à base de charbon, un développement allemand des renouvelables quel qu’en soit le coût au moment même où les autres pays font des efforts pour mesurer leurs aides afin de tenir compte de leurs déficits budgétaires, des conflits quant aux interconnexions électriques qu’il convient de construire et, au total, une plus faible probabilité d’atteindre sur le sol européen la baisse de 20% en 2020 des émissions de gaz à effet de serre.

Dans le même temps, la Commission de l’Environnement du Parlement européen a adopté les propositions du représentant néerlandais Bas Eickout selon laquelle " le refus de l’UE de relever l’objectif périmé de 20% fait que les Européens sont maintenant des retardataires plutôt que des pionniers dans le domaine de la diplomatie internationale sur les questions climatiques " et de le porter à 30%.

C’est considérer que la priorité de l’Union européenne est de montrer l’exemple comme un bon élève au lieu de contribuer comme le reste du monde à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre dans le cadre de ses priorités économiques et sociales.

Enfin, la Commission, sous l’impulsion du Commissaire à l’énergie, à l’occasion des tests nécessaires sur les installations nucléaires au lendemain de Fukushima, a confondu la sûreté des installations qui est de la responsabilité des exploitants et qu’elle est en devoir de faire examiner et la sécurité des sites industriels des Etats-membres sensibles à des actions terroristes (ou militaires) cherchant par ce biais à peser sur les politiques de mix énergétiques qui sont de la responsabilité des Etats membres.

Ces exemples montrent que les autorités des Etats et de l’Union doivent constamment veiller à une connaissance pragmatique des réalités économiques et sociales du terrain et ne pas se laisser guider par des points de vue résultant de visions théoriques. Un humoriste pourrait dire qu’actuellement " l’énergie rend fou en Europe " et un pessimiste ajouterait que ce n’est pas le meilleur moyen de contribuer dans la cohérence à la défense du climat.