Publié le 06/09/2011

Thomas PATRIOTA

Cette étude examine les caractéristiques du rapprochement du Brésil avec l’Afrique dans le contexte de son affirmation sur la scène internationale à travers trois axes : une évaluation quantitative et qualitative des relations actuelles, après un court historique des relations passées ; une analyse des motivations, des perceptions, et de l’influence des divers acteurs qui définissent la ligne adoptée par la politique extérieure brésilienne envers le continent ; enfin, une analyse de l’actuel " modèle " de développement brésilien et de la manière dont son apparent succès permet de diffuser la validité des expériences nationales à des fins de développement des pays africains, diffusion qui permet à son tour également au Brésil d’avancer dans la réalisation de ses objectifs de politique extérieure sur la scène globale.

Quelques mois après la fin du deuxième et dernier mandat du Président Luiz Inácio Lula da Silva en 2010, le chemin parcouru par la principale puissance politique et économique latino-américaine durant la dernière décennie a considérablement accru son importance sur la scène mondiale. La stabilité politique et économique conquise au milieu des années 1990 a créé un terrain fertile pour un cycle d’expansion économique dans les années 2000 qui place aujourd’hui le pays au deuxième rang économique mondial des pays en développement après la Chine. La croissance observée dans la dernière décennie a été concomitante avec une réduction des inégalités, ce qui a permis à 24,1 millions de citoyens de rejoindre la classe moyenne entre 2003 et 2008, laquelle constitue désormais la majorité de la population. Le poids dominant du marché interne dans l’économie (les exportations constituent seulement 23 % du PIB en 2008 (Leo et Watanabe, 2010), les politiques actives de stimulation de la demande des secteurs de bas revenu, un système bancaire conservateur et largement orienté vers le marché domestique, une diversification des partenariats commerciaux et l’accumulation de réserves de change ont permis au pays d’être l’un des derniers à être touché par la crise financière et économique de 2008-2009 et l’un des premiers à en sortir.

Le rôle de la politique extérieure a été crucial dans la diversification des partenariats commerciaux, en multipliant les accords avec des pays n’appartenant pas aux sphères traditionnelles d’échanges du Brésil (Amérique du Nord, Europe, Japon et Amérique du Sud). Ainsi, alors qu’en 2002, les exportations brésiliennes à destination d’autres pays du Sud représentaient 40 % du total, en 2009, cette proportion a atteint les 58 %. Le commerce avec toutes les régions du monde a été multiplié plusieurs fois durant cette période. Parmi les différentes régions concernées, l’Afrique est celle qui a connu la deuxième plus grande augmentation relative, avec une croissance de 361 % entre 2003 et 2008.

Dès le début du gouvernement Lula, si l’Amérique du Sud a été fixée comme la priorité de la politique extérieure, l’Afrique a été souvent mise en avant comme la deuxième région sur laquelle concentrer les efforts de rapprochement, au même moment où d’autres puissances émergentes telles que la Chine, l’Inde, ou des pays à revenus moyens tels que la Turquie, les pays du Golfe, ou la Malaisie entamaient ou reprenaient également ce processus avec le continent africain.

Nous examinerons les caractéristiques de ce nouveau rapprochement du Brésil avec l’Afrique dans le contexte de son affirmation sur la scène internationale à travers trois axes : une évaluation quantitative et qualitative des relations actuelles, après un court historique des relations passées ; une analyse des motivations, des perceptions, et de l’influence des divers acteurs qui définissent la ligne adoptée par la politique extérieure brésilienne envers le continent ; une analyse de l’actuel « modèle » de développement brésilien et de la manière dont son apparent succès permet de diffuser la validité des expériences nationales à des fins de développement des pays africains, diffusion qui permet à son tour également au Brésil d’avancer dans la réalisation de ses objectifs de politique extérieure sur la scène globale.