Publié le 03/08/2022

Marc JULIENNE, interrogé par Marie Terrier pour le HuffPost.

Exercices navals et aériens, possibles tirs de missiles... Après la visite de Nancy Pelosi, « les tensions sont à leur comble et ça va durer », prévient Marc Julienne, spécialiste de la Chine.

CHINE - La Chine réplique après la visite de la présidente de la Chambre des représentants américaine, Nancy Pelosi, à Taïpei. Ce jeudi 4 août, elle va lancer des exercices militaires ciblés au large des côtes de Taïwan qu’elle considère comme partie intégrante de son territoire. Ces manœuvres doivent durer jusqu’au dimanche 7 août.

Pour le ministère des Affaires étrangères chinois, il s’agit « d’une mesure nécessaire et légitime afin de répliquer aux graves provocations de certains politiciens américains et des indépendantistes taïwanais ». Les exercices, qui s’approcheront jusqu’à 20 kilomètres des côtes de l’île, permettront « de défendre avec fermeté notre souveraineté nationale et notre intégrité territoriale », a précisé le ministère. Selon lui, « les États-Unis sont les provocateurs » et non pas « la Chine, qui est la victime ».

Concrètement, à quoi vont ressembler ces manœuvres militaires ? Le commandement chinois a annoncé des « exercices navals et aériens conjoints dans les espaces maritimes et aériens du nord, du sud-ouest et du sud-est » de l’île. Des « tirs à munitions réelles à longue portée » sont prévus dans le détroit de Taïwan, qui sépare Taïwan de la Chine continentale.

Démonstration de force de la part de la Pékin

« L’Armée Populaire de Libération (APL) mènera d’importants exercices militaires et activités d’entraînement, y compris des exercices de tir réel dans six zones entourant l’île de Taïwan (...) de jeudi midi à dimanche midi », détaille aussi le journal nationaliste Global Times.

Vous pouvez voir ces zones dans le graphique ci-dessous. Elles se trouvent pour la plupart du côté taïwanais de la ligne médiane de démarcation informelle entre les deux pays. Pékin, qui ne reconnaît pas l’indépendance de Taïwan, ne reconnaît pas non plus cette ligne.

Pour Marc Julienne, responsable des activités Chine à l’Institut français des relations internationales (Ifri), « c’est un épisode sans précédent. La Chine est encore plus proche de Taïwan que les tirs de missile lors de la crise de 1996 », après la première élection présidentielle au suffrage direct de l’île.

Un missile au-dessus de Taïwan ?

Toutefois, note le chercheur, les Chinois sont « restés très flous sur la nature des exercices ». En plus des précédentes annonces, Marc Julienne anticipe « des tirs de missiles balistiques de courte portée à quelques kilomètres des côtes, pour montrer qu’ils sont à portée. Un autre geste fort serait le tir d’un missile hypersonique DF-17 », apparu dans l’arsenal chinois en 2019.

Autre manœuvre attendue mais encore jamais expérimentée par Pékin : tirer un missile depuis le continent qui retomberait dans le Pacifique, à l’Est de l’île. « Le missile passerait au-dessus de Taïwan, ce serait inédit », pointe Marc Julienne. Et le chercheur s’inquiète : « Les tensions sont à leur comble et ça va durer. Il y a forcément un risque de dérapage, d’accident, d’une erreur de calcul » dont les conséquences pourraient être dramatiques.

Taïwan aussi craint pour sa sécurité et dénonce les « manœuvres de la Chine (qui) empiètent sur (...) les eaux territoriales » de l’île. Comme un avertissement, 21 avions chinois sont entrés dès mercredi dans la zone d’identification de défense aérienne de l’île (plus large que l’espace aérien), selon le ministère de la Défense. « Face à des menaces militaires délibérément accrues, Taïwan ne reculera pas », a prévenu la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen.

 

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