Publié le 12/09/2022
Crédits: Orange Marine

Camille MOREL

A l’heure où le marché des câbles sous-marins de communication subit de profondes transformations et une politisation croissante de cette technologie sur la scène internationale, cette note offre un état des lieux de la connectivité numérique des Etats du Pacifique « insulaire » (Polynésie, Mélanésie et Micronésie) et des principaux enjeux et perspectives qui en ressortent.

Permettant la circulation de plus de 98% de nos données internationales, les 450 « lignes » de fibres optiques réparties au fond des océans en 2022 sont devenues indispensables au bon fonctionnement de nos sociétés. Pour les îles du Pacifique, isolées physiquement, cette connexion par câble est d’autant plus essentielle qu’elle permet à la fois la numérisation des différents secteurs de l’économie et de la société (industrie, éducation, santé…) mais également le maintien d’un lien virtuel permanent avec le reste du monde, l’existence de satellites ne permettant pas de palier en totalité la mise hors service d’un câble sous-marin.

Inextricablement liés aux questions géopolitiques de l’Indopacifique, les câbles sous-marins en Océanie n’échappent pas aux rivalités entre puissances. Du fait des longues distances, mais aussi du coût que représentent pour eux ces infrastructures, les territoires insulaires du Pacifique sont plus à même d’être dépendants et soumis à une influence extérieure. Par ailleurs, ces infrastructures sont concernées par la montée en puissance de la compétition maritime entre les Etats, sur fond d’enjeux tant militaires – comme le Seabed Warfare – qu’économiques, démographiques et environnementaux.

Si l’océan Pacifique est devenu l’un des trois axes majeurs de la donnée au XXIe siècle, marqué par une connectivité croissante depuis 2011 et la montée en puissance de la Chine, le Pacifique insulaire s’en distingue à plusieurs niveaux :

  • Du fait de sa géographie particulière, cette zone apparaît tout d’abord sous-maillée par rapport à l’axe transpacifique Nord et aux liaisons inter-Asie et s’apparente plus à une zone de passage qu’à un véritable espace d’investissement ;
  • L’écosystème en place et les moyens déployés par les acteurs privés et publics pour mettre en œuvre, gérer et opérer les liaisons sous-marines dans la région sont adaptés aux contraintes et enjeux locaux ;
  • Cette réalité se fait au bénéfice principal de l’Australie et des Etats-Unis, et au détriment de la Chine, qui voit son ambition croissante dans la région chaque jour contrariée ;
  • Théâtre de la rivalité sino-américaine, le Pacifique insulaire doit ainsi s’adapter pour contourner les difficultés politiques et répondre à l’impérieuse nécessité de résilience numérique pour sa population ;
  • Ce défi semble propice à l’éclosion de divers projets de câbles alternatifs, qui dessinent pour l’avenir des opportunités nouvelles en matière de numérique.