Publié le 04/11/2020
Le Président Kagame rencontre le Premier Ministre Benyamin Netanyahou | Jerusalem, 10 juillet 2017

Benjamin AUGE

Depuis son arrivée au pouvoir en 2009, Benyamin Netanyahou, Premier ministre d'Israëll, n'a pas fait des relations israélo-africaine une priorité de sa politique étrangère.

Après avoir rompu leurs relations avec Israël à l’issue de la guerre du Yom Kippour en 1973[1], la plupart des États africains – en dehors du Malawi, de l’Afrique du Sud (hormis entre 1975 et 1979), du Swaziland et du Lesotho – ont finalement renoué avec l’État hébreu durant les années 1980 et 1990[2] et plus récemment pour certains autres. La reprise de liens diplomatiques s’est ainsi faite progressivement, à mesure que des efforts de paix étaient entrepris au sujet de la Palestine.

Israël jouit désormais de relations diplomatiques avec plus de quarante États africains subsahariens mais ne possède que douze ambassades sur l’ensemble du continent, dont celle du Caire. Les dernières à être installées ont été celles de Kigali au Rwanda en 2019[3] et d’Accra au Ghana en 2011.

Le gouvernement d’Israël envisage aujourd’hui le continent soit comme une zone d’influence ancienne (Éthiopie, Érythrée, Cameroun, Ghana, Côte d’Ivoire, Ouganda, et depuis deux décennies, Rwanda) qui doit être densifiée, soit comme un nouvel espace d’influence à investir (Sahel, Afrique centrale…). Cette relation passe par différents canaux traditionnels, dont certains ont été très affaiblis par Benyamin Netanyahou, Premier ministre d’Israël entre 1996 et 1999, et depuis 2009. C’est particulièrement le cas du ministère des Affaires étrangères et de son pendant chargé de la coopération, le Mashav. Cependant, les secteurs de la sécurité et du renseignement (Mossad), pilotés par le bureau du Premier ministre, sont des vecteurs forts de la politique israélienne à l’extérieur, d’où la prééminence de Benyamin Netanyahou sur les affaires étrangères en général, et sur l’Afrique en particulier.

Cette étude propose d'analyser l'évolution concrète des relations politique, économique et sécuritaire, entre l’Afrique et l’État hébreu durant la décennie 2009-2020. Il s’agira ici d’aller au-delà du simple récit de l’histoire de ces liens. Depuis 2009, le Premier ministre, Benyamin Netanyahou – toujours au pouvoir à l’écriture de ces lignes après un accord de coalition avec son opposant Benny Gantz –, a ainsi fréquemment parlé du retour de son pays sur la scène africaine[4] sans forcément donner les moyens financiers à son administration pour y parvenir.


[1]. Le slogan lancé notamment en février 2016 lors de la venue du président kenyan Uhuru Kenyatta « Israel Is Coming Back to Africa, and Africa Is Returning to Israel » est répété à l’envi par le Premier ministre Benyamin Netanyahou.
 

[2]. Israël maintenait une trentaine d’ambassades en Afrique avant la guerre du Yom Kippour. En tant que ministre des Affaires étrangères (1956-1966) puis Premier ministre d’Israël (1969-1974), Golda Meir a largement accompagné la coopération avec l’Afrique via l’organisme de coopération, le Mashav. Golda Meir a effectué plusieurs voyages, notamment au Liberia en 1958 ainsi qu’en Gold Coast devenu le Ghana à son indépendance. Elle a fait condamner aux Nations unies le régime sud-africain d’apartheid en 1962 alors que la relation avec Pretoria fut par la suite l’un des piliers de la politique étrangère d’Israël.
 

[3]. Cette décision a été prise sous la pression de l’Organisation de l’Union africaine (OUA), elle-même largement influencée par les pays producteurs de pétrole du golfe Persique et de la Ligue arabe. Avant cela, la Guinée de Ahmed Sekou Touré, très proche de l’Égypte, avait décidé de rompre dès 1967 suite à la guerre des Six Jours. Voir à ce sujet A. Bouba Nouhou, « Lente progression d’Israël en Afrique », Le Monde diplomatique, décembre 2017. Le Congo, le Tchad, le Niger, le Mali et le Burundi cessent également leurs relations avec Tel Aviv entre 1972 et 1973, soit avant la guerre du Yom Kippour.
 

[4]. Durant les années pendant lesquelles les relations diplomatiques étaient rompues, les services de renseignement extérieur israéliens (le Mossad) ont tout de même maintenu des échanges soutenus avec nombre d’États, conservant ainsi un lien entre leur pays et l’Afrique, qui officiellement condamnait la politique d’Israël envers les Palestiniens.