22
juin
2022
Espace Média L'Ifri dans les médias
Paul MAURICE, cité par Philippe Mathé dans Ouest France

Pourquoi le France n’arrive pas à construire de coalition pour gouverner

En Europe, de nombreux pays sont gérés par des coalitions gouvernementales. Exceptions notables : le Royaume-Uni et la France. L’absence de majorité à l’Assemblée nationale va-t-elle accélérer un changement des mœurs politiques ? Rien n’est moins sûr tant la culture du compromis ne va pas naturellement de pair avec notre régime présidentiel. Surtout dans le paysage actuel.

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Allemagne, Italie, Espagne mais aussi Belgique, Pays-Bas… À nos frontières, plusieurs exécutifs ont dû former des coalitions pour gouverner. C’est la norme en Allemagne ; c’est devenu une habitude en Italie où les gouvernements font rarement long feu ; c’est plus récent en Espagne où un premier gouvernement de coalition a été formé en 2020 après un accord entre Pablo Iglesias, l’ancien leader de Podemos, et le socialiste Pedro Sánchez.

En France, ce n’est jamais arrivé. Il y a bien eu les ministres d’ouverture de François Mitterrand, en 1988, déjà à l’époque pour donner une majorité au gouvernement Rocard, mais cela concernait une dizaine d’élus.

Plus près de nous, Nicolas Sarkozy avait débauché des politiques de gauche après son élection en 2007 tandis qu’Emmanuel Macron s’est construit une majorité en attirant les modérés de gauche et de droite il y a cinq ans. Aujourd’hui, le calcul de 2017 est caduc.

 

Des résultats dignes d’une proportionnelle

Le résultat des législatives, dimanche soir, a bouleversé la donne. « Il correspond à celui d’une élection à la proportionnelle alors que le mode de scrutin majoritaire à deux tours était fait pour favoriser les grands partis », rappelle le politologue Olivier Costa, directeur de recherche CNRS au Cevipof (Centre de recherches politiques de Sciences Po).

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D’Allemagne, « une France ingouvernable »

Vue d’Allemagne, un modèle en termes de coalition, l’équation apparaît insoluble. 

  • « La France semble ingouvernable. Et les Allemands ont du mal à comprendre l’état de frustration des Français vis-à-vis d’Emmanuel Macron, qui leur semble pourtant politiquement assez modéré », résume Paul Maurice, chercheur à l’Ifri (Institut français des relations internationales), membre du Comité d’études des relations franco-allemandes.

Démocratie parlementaire, l’Allemagne est habituée aux coalitions… depuis toujours. 

  • « Elles font partie de l’histoire politique de l’Allemagne. Depuis la République de Weimar, les trois principales forces politiques allemandes ont l’habitude de gouverner ensemble. Ces coalitions ont vite repris dès l’après-guerre, d’abord au niveau régional des Länder, et à l’échelle fédérale », rappelle Paul Maurice.

Le chancelier lui-même est issu du Bundestag, l’assemblée parlementaire. Et le scrutin mixte (uninominal à un tour pour la circonscription, proportionnel à l’échelle des Länder) qui permet de désigner les députés fait qu’aucun parti n’a jamais obtenu de majorité absolue, à l’exception de la CDU en 1957. De quoi rendre les négociations inévitables.

 

Une question de mentalité ?

Mais cette différence institutionnelle ne fait pas tout. C’est aussi une question de culture politique : 

  • « En Allemagne, les partis sont restés forts et ont l’habitude de la démocratie interne qui n’amène pas à la scission. Et puis avoir été au pouvoir est vu comme quelque chose de positif quand, en France, il y a une volonté de faire un big bang à chaque fois », énumère Paul Maurice.

L’absence de coalition en France, une question de mentalité ? Le chercheur de l’Ifri ne le pense pas :

  • « Les coalitions étaient monnaie courante durant les IIIe et IVe Républiques. Seuls les communistes et les Gaullistes en restaient écartés. Les gouvernements arrivaient toujours à trouver un compromis. Le souci, c’était de le garder. »

Mais l’absence de culture du compromis est aussi entretenue par le scrutin présidentiel : « Toute notre vie politique tourne autour de l’élection du Président. On est dans une logique d’écurie où chacun est derrière son candidat. Ce n’est pas évident après avoir dit tant de mal de Macron durant la campagne de lui trouver aujourd’hui des vertus », observe Olivier Costa.

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