21
nov
2022
Espace Média L'Ifri dans les médias
Héloïse FAYET, invitée de l'émission "18h : Loison" sur Franceinfo.

Vers un troisième âge de la menace nucléaire ?

La centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée par les forces russes depuis mars 2022, est exposée à des bombardements réguliers depuis le début de la guerre en Ukraine. Entre samedi 19 et dimanche 20 novembre 2022, une dizaine de frappes ont ciblé les blocs énergétiques quatre et cinq et ont causé des dégâts près de bâtiments dits spéciales qui abritent des dépôts de combustibles frais et usés. Les deux belligérants s’accusent d’être à l’origine de ces tirs. 

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La pression exercée sur la sécurité de la centrale illustre-elle l’entrée dans un nouvel âge nucléaire ?

La menace qui pèse sur la centrale nucléaire de Zaporijjia s’inscrit dans un registre différent que le signalement stratégique nucléaire du Kremlin depuis le début de la guerre en Ukraine. Même si les frappes à proximité de la centrale visent à contraindre l’adversaire à reculer et à ranimer une crainte de radiation au sein de la population, un endommagement de celle-ci serait un accident que ne souhaitent ni les russes ni les ukrainiens en raison de la proximité de leurs troupes et des territoires qu’ils revendiquent de la centrale. A l’inverse, le signalement stratégique russe relève d’une stratégie de dissuasion nucléaire. Les forces stratégiques russes ont ainsi récemment conduit l’exercice de dissuasion Grom 2022 qui s’est déroulé de façon conforme selon les observateurs.

Les frappes contre la centrale nucléaire de Zaporijjia représent-elles un fait inédit ? 

C’est la première fois qu’un conflit de haute intensité se déroule à proximité immédiate d’une centrale nucléaire. Toutefois, ce n’est pas la première fois qu’une telle infrastructure est prise pour cible. Les israéliens avaient en effet détruit le projet de centrale Osirak en Irak avant que celle-ci n’entre en fonctionnement. Le risque d’endommagement de la centrale nucléaire de Zaporijjia est d’autant plus important que les simulations visant à estimer sa résistance ne prennent pas en compte le risque de conflit armée à sa proximité.

Quelle est la situation des puissances nucléaires mondiales ? 

On constate à l’échelle internationale une prolifération nucléaire verticale et horizontale : verticale car les pays déjà dotés de la bombe accroissent et modernisent leurs arsenaux, à l’image de la Russie, de la Chine qui devrait passer de 300 têtes nucléaires il y a quelques années à 1000 en 2030, ou de la Corée du Nord qui a récemment tiré son nouveau missile balistique intercontinental Hwasong-17; et horizontale car l’Iran continue son processus d’acquisition de l’arme nucléaire. Téhéran doit encore poursuivre l’enrichissement de son uranium, aujourd’hui estimé à environ 60%, pour atteindre un niveau de qualité militaire d’environ 90%, avant de procéder à la vectorisation de l’arme obtenue. Les négociations pour trouver un nouvel accord ont repris en novembre 2021 mais les conséquences de la guerre en Ukraine nuisent à leur poursuite. La conflit a en effet redéfini les priorités dans l’agenda diplomatique américain tandis que le soutien de Téhéran à l’effort de guerre russe, en fournissant des drones et des missiles balistiques de courte portée, ainsi que la répression des manifestations dans le pays, portent préjudicent à l'approfondissement des négociations entre les Etats-Unis et les représentants iraniens.

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