22
mar
2021
Espace Média L'Ifri dans les médias
Marc JULIENNE, cité par Thaïs Chaigne dans Libération.

«Petite frappe», «hyène folle» : sur Twitter, l’ambassade de Chine en France en mode troll

Le compte Twitter officiel de l’ambassade a insulté le chercheur français Antoine Bondaz, une attaque ad hominem inédite, mais représentative de la diplomatie offensive de certains ambassadeurs sur les réseaux sociaux.

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«Cette stratégie de communication offensive et proactive, notamment sur Twitter, est insufflée au plus haut niveau de l’État», explique à CheckNews Marc Julienne, chercheur au centre Asie de l’IFRI et coauteur d’un récent article sur le sujet pour la revue Politique étrangère. Le chercheur date les origines de ce virage offensif en ligne à un discours du président chinois, Xi Jinping, prononcé devant l’école centrale du Parti en septembre 2019 («équivalent» de l’ENA) où il appelait les fonctionnaires chinois (et donc les diplomates) à avoir un «esprit combattant» pour défendre la Chine, face à toutes les attaques. L’ambassadeur Lu Shaye est ainsi une figure de proue des «Loups guerriers», surnom donné aux diplomates chinois très agressifs sur les réseaux sociaux qui discréditent toutes les critiques envers la Chine en les qualifiant d’offensive anti-chinoise occidentale.

Selon les deux chercheurs, le compte Twitter de l’Ambassade est un des plus agressifs d’Europe. «Il se permet des libertés, pas représentatives de toutes les ambassades, mais de cette tendance au sein de la diplomatie Chinoise», note Antoine Bondaz. «Ce message a l’adresse d’Antoine Bondaz ne vise certes pas la population chinoise – qui n’a pas accès à Twitter de toute façon –, mais cherche à démontrer loyauté et détermination aux plus hautes instances du Parti communiste», analyse de son côté Marc Julienne. Les ambassadeurs de Suède et d’Allemagne ont également des stratégies de communications qui s’approchent de celles de Lu Shaye, selon Marc Julienne. Idem pour le très actif compte de l’ambassade Chinoise à Washington, qui a été suspendu par Twitter après un tweet qui défendait la politique au Xinjiang.

Que dit le quai d’Orsay ?

Avec cette attaque purement personnelle auprès d’un chercheur, «la Chine sort totalement des pratiques diplomatiques», note Marc Julienne. Le tweet a fait réagir plusieurs chercheurs et politiques qui ont apporté leur soutien à Antoine Bondaz, dont le député européen Raphaël Glucksmann qui a demandé au gouvernement de convoquer l’ambassadeur.

La diplomatie française avait convoqué l’ambassadeur en avril 2020 après une série de communiqués réunis sous l’appellation «Observations d’un diplomate chinois en poste à Paris» qui critiquait la gestion française de l’épidémie dénonçant notamment le traitement des pensionnaires d’Ehpad (l’ambassadeur expliquera ensuite qu’il faisait référence à l’Espagne).

L’Ambassade de Chine a fustigé dimanche les appels à la convocation de l’ambassadeur Lu Shaye par des politiques et chercheurs français, estimant que cet échange ne relevait pas du champ diplomatique. Le quai d’Orsay n’a pour l’instant pas réagi. «Tant qu’il n’y aura pas de recadrage au plus haut niveau, ils continueront», estime Antoine Bondaz.

 

 

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Chine France