Merz et Macron, un couple franco-allemand condamné à faire mieux
En choisissant la France pour sa première visite officielle, Friedrich Merz, futur chef du gouvernement allemand (CDU), tentera mercredi avec Emmanuel Macron de relancer une relation bilatérale ces derniers temps hésitante, avec pour intérêt commun une Europe en quête de puissance.
Il a des ancêtres huguenots, un de ses grand-pères s'appelait Savigny, il a même participé à un échange scolaire en Auvergne: le futur chancelier a des liens personnels étroits avec la France et appartient à une génération pour laquelle les relations franco-allemandes sont essentielles.
Le président français Emmanuel Macron l'accueillera en ami après déjà plusieurs rencontres.
Dès le soir des élections allemandes, il l'avait invité à Paris, où ils avaient discuté pendant plus de trois heures des grandes lignes de leur future coopération. Les deux hommes se sont également rencontrés à Berlin, avant même l'entrée en fonction de M. Merz. Et le futur ministre des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a d'ores et déjà noué des contacts à Paris.
Mercredi, "c'est déjà une visite de travail sur une relance de l'agenda franco-allemand, avec une volonté de la part du chancelier Merz très clairement marquée, y compris dans le contrat de coalition, sur le fait de retrouver le réflexe franco-allemand", indique l'Elysée.
"Nous avons besoin de nous retrouver ou en tout cas de solder les malentendus".
- "Le réflexe franco-allemand" -
Car les relations entre Paris et Berlin ont été notoirement fraîches ces dernières années. Emmanuel Macron et Olaf Scholz affichaient des tempéraments opposés, omniprésent pour l'un, taiseux pour l'autre.
Et Paris ne dissimulait guère son impatience d'ouvrir une nouvelle page au sein d'un couple franco-allemand historiquement essentiel pour l'Union européenne.
"Il y a une grande attente que Merz incarne l'opposé de ce que représentait Olaf Scholz", explique à l'AFP Hélène Miard-Delacroix, historienne à l'université de la Sorbonne, pour qui le chancelier sortant était perçu en France comme "réticent et un peu arrogant".
Son successeur semble de prime abord plus proche d'Emmanuel Macron. Son assouplissement inattendu de la règle d'or budgétaire, notamment au profit d'un effort colossal dans la défense, et son regard critique sur les relations transatlantiques depuis l'élection de Donald Trump à Washington, ont ainsi été très bien accueillis à Paris.
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"Merz a le réflexe franco-allemand. Même s'il y a des désaccords, il va aller parler avec la France", observe Paul Maurice, secrétaire général du Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa).
"Mais attention à ne pas trop fantasmer", tempère-t-il. "Il reste un homme politique allemand dans le système politique allemand", avec une marge de manoeuvre bien plus limitée que celle du président français.
"Mais attention à ne pas trop fantasmer", tempère-t-il. "Il reste un homme politique allemand dans le système politique allemand", avec une marge de manoeuvre bien plus limitée que celle du président français.
Secrétaire général du Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Ifri
- Un duo à trois avec Varsovie -
"Merz et Macron se ressemblent dans leur style, mais sur le fond il y a encore de grandes divergences, notamment sur les euro-obligations ou l'accord de libre-échange avec le Mercosur", note également le député (SPD) Nils Schmid.
L'Elysée souligne pour sa part l'idée de "créer immédiatement cette dynamique franco-allemande qui entraîne le reste", et nécessite que les deux puissances "trouvent les moyens de converger, et quand elles n'y parviennent pas, de contenir leurs différences de telle manière que le moteur franco-allemand joue tout son rôle".
L'ambition est donc forte, les obstacles concrets aussi.
"Des liens plus étroits, des visions partagées et une volonté de compromis ne suffisent pas à faire tourner le moteur franco-allemand", prévient Sébastien Maillard, du cercle de réflexion britannique Chatham House.
Parmi les moteurs puissants, "les deux dirigeants sont pressés politiquement : le mandat de Macron se termine dans deux ans, tandis que Merz est impatient de montrer que l'Allemagne est de retour en Europe", ajoute-t-il, pourtant, convaincu que l'Union européenne "ne peut guère se permettre que ses deux membres clés manquent d'impulsion à un moment aussi critique pour le sort de l'intégration européenne".
A cet égard, le bilatéral ne saurait être exclusif. En partant de Paris, le chancelier allemand passera par Varsovie. Et le Premier ministre polonais Donald Tusk est attendu vendredi en France pour signer un traité bilatéral présenté comme inédit.
Assurément, l'amitié franco-allemande devra laisser entrer d'autres partenaires récemment montés en puissance, sur fond de menaces russes.
"Le moteur franco-allemand ne peut plus prétendre alimenter toute l'UE. Dans l'UE actuelle à 27, il faut être plus de deux pour danser le tango", relève Sébastien Maillard. "De plus en plus, le duo devient un trio avec la Pologne".
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