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Après le Brexit, le Royaume-Uni veut renforcer sa dissuasion nucléaire

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Londres veut relever le nombre de ses têtes nucléaires, afin de rappeler qu'il appartient au petit club des grandes puissances nucléaires même s'il a quitté l'Union européenne.

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​La nouvelle désarçonne : pour la première fois depuis la chute de l'Union soviétique il y plus de trente ans, un Etat occidental, en l'occurrence le Royaume-Uni, annonce sa volonté d'augmenter son stock d'armes nucléaires. Une annonce qui intervient à peine quelques semaines après la reconduction, in extremis, jusqu'en 2026 du traité Start de réduction des armes stratégiques entre la Russie et les Etats-Unis, un des rares documents de gouvernance internationale encore sur la table pour enrayer la course aux armements.

« La décision du Royaume-Uni d'augmenter son stock d'armes de destruction massive en plein milieu d'une pandémie est irresponsable, dangereuse et viole le droit international », a dénoncé Beatrice Fihn, la directrice de l'Ican (Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires). Le groupe Campaign for Nuclear Disarmament (CND) y voit un « premier pas vers une nouvelle course à l'armement nucléaire » et une « énorme provocation sur la scène mondiale ».

De fait, la revue stratégique en matière sécurité, de défense et de politique étrangère menée outre-Manche évoque la possibilité d'augmenter de 180 à 260 le stock d'ogives nucléaires, soit une hausse d'environ 45 % ! Pour s'expliquer, le ministre des Affaires étrangères, Dominic Raab, a rappelé que le Royaume-Uni devait maintenir un niveau minimum et crédible de dissuasion dans des temps changeants : « C'est la garantie ultime, la police d'assurance contre les pires menaces d'Etats hostiles. »

Avec cette annonce, le gouvernement britannique ne viole pas le traité de non-prolifération nucléaire, comme l'affirment certaines ONG. Il réaffirme haut et fort qu'il appartient aux puissances nucléaires autorisées comme la France, les Etats-Unis, la Russie et la Chine et qu'il veut rester au centre du jeu mondial, en dépit de sa marginalisation européenne. Quant à son analyse sur la dangerosité du monde, qui l'oblige à renforcer « sa police d'assurance », elle est partagée par la France, qui vient de publier un document d'actualisation de sa revue stratégique de 2017 et qui évoque aussi le durcissement de la compétition entre les puissances et la contestation de l'ordre international.

Une dissuasion minimale avec 4 sous-marins

Avec 260 ogives, Londres aspire finalement à détenir un armement équivalent à la France, qui déclare « moins de 300 têtes nucléaires ». En comparaison, le traité Start limite la détention d'ogives nucléaires à 1.550 pièces pour les armes offensives des Américains et des Russes. A côté des deux superpuissances nucléaires, Paris et Londres restent dans une doctrine purement défensive. Mais alors que la France déploie une dissuasion aérienne avec les missiles ASMPA et maritime avec les missiles M51 portés par ses 4 sous-marins lanceurs d'engins, les Britanniques n'ont plus recours qu'à leurs sous-marins. Ils en ont quatre, comme Paris, mais ces derniers sont équipés de missiles américains.

  • « Londres révise son objectif de façon transparente et chiffrée au vu d'un diagnostic sur la dégradation de l'environnement international, qui est partagé par la France, constate Corentin Brustlein, directeur du Centre des études de sécurité de l'Ifri. Cela n'en fait pas pour autant un champion de l'arme nucléaire. » Le chercheur rappelle que la Chine ne communique aucun chiffre sur ses têtes nucléaires, pas plus que l'Inde, le Pakistan et Israël. Pour garder une dissuasion crédible, Londres a besoin de l'appui technologique des Etats-Unis et son annonce peut aussi s'interpréter comme un appel à l'aide au moment où Washington étudie de nouvelles versions de ses armes nucléaires.

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Corentin BRUSTLEIN

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Ancien Directeur du Centre des études de sécurité de l'Ifri