16
nov
2022
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Claude-France ARNOULD, citée par Vincent Collen dans Les Echos

La Pologne fait preuve de retenue après le tir de missile sur son territoire

Varsovie cherche avant tout à éviter l'escalade et à rester sur les mêmes positions que ses alliés de l'Otan, Etats-Unis en tête. Le tir meurtrier de mardi conforte néanmoins l'engagement militaire de long terme de la Pologne face à une menace russe considérée comme permanente.

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Parfois accusée d'être « va-t-en-guerre » vis-à-vis de la Russie, la Pologne fait preuve d'une retenue remarquable après le tir de missile qui a tué deux personnes sur son territoire mardi , près de la frontière avec l'Ukraine. Le Premier ministre, Mateusz Morawiecki, a certes annoncé un renforcement de la surveillance de l'espace aérien polonais et convoqué l'ambassadeur russe à Varsovie pour « des explications détaillées et immédiates ». Mais il a surtout appelé « tous les Polonais à garder le calme ».

« Rien n'indique qu'il s'agissait d'une attaque intentionnelle contre la Pologne, a affirmé de son côté le président de la République, Andrzej Duda. Il y a une forte probabilité qu'il s'agisse d'un missile qui a simplement été utilisé par la défense antiaérienne ukrainienne ». Varsovie s'est donc immédiatement aligné sur les positions de ses partenaires de l'Otan , Etats-Unis en tête, cherchant à empêcher toute escalade.

Rester sur la ligne de ses alliés

« Le gouvernement s'est montré très prudent, il veut éviter d'ajouter de l'émotion dans une atmosphère déjà tendue, analyse Lukasz Kulesa du Polish Institute of International Affairs, un think tank basé dans la capitale polonaise. Il est avant tout important pour lui de rester sur la même ligne que ses alliés, Otan, Etats-Unis, Union européenne. »

« Cette retenue du gouvernement polonais est d'autant plus frappante qu'elle est loin d'être observée sur d'autres sujets, notamment dans les relations conflictuelles de la Pologne avec l'Union européenne au sujet de l'Etat de droit , ou encore avec l'Allemagne », relève Claude-France Arnould, de l'Institut français des relations internationales. La crainte d'une escalade incite Varsovie à calmer le jeu et à montrer un alignement total sur ses alliés, Etats-Unis en tête. »

« Nous devons mieux nous protéger »

L'accident meurtrier est néanmoins venu rappeler aux Polonais, s'il en était besoin, leur proximité géographique avec la zone de conflit. « Contrairement à d'autres pays européens plus éloignés, nous sommes toujours très conscients qu'une frappe peut nous toucher, souligne l'eurodéputé Zdzisław Krasnodębski, membre du PIS (droite conservatrice et eurosceptique) au pouvoir à Varsovie. Un autre missile pourrait tomber sur une ville polonaise, par accident ou non. C'est pourquoi nous devons mieux nous protéger, notamment en renforçant notre défense antiaérienne. »

« Ce type d'événement accidentel peut se produire n'importe où et n'importe quand. D'un point de vue militaire, il n'existe pas de systèmes de défense aérienne qui permettraient, surtout dans un pays au territoire assez étendu, de se défendre efficacement contre toute attaque ou frappe inattendue de missiles ou de roquettes », estime Wlodzimierz Cimoszewicz, député européen de l'opposition social-démocrate.

La Pologne a déjà fortement augmenté ses dépenses militaires : le budget de la défense frôle les 3 % du PIB, la proportion la plus élevée de l'Otan derrière la Grèce et les Etats-Unis.

« L'accident de cette semaine confirme ce que l'on craint depuis le début de la guerre : un événement, accidentel ou non, qui déclenche une escalade, reprend Claude-France Arnould. Pour Varsovie, l'hostilité de la Russie est un danger permanent. Les Polonais voient l'antagonisme militaire russe durer pendant des décennies, ce qui n'est pas le cas d'autres pays européens. Cela justifie pour eux de s'armer dans cette perspective de très long terme. »

 

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