La relation turco-hongroise : opportunisme de circonstance ou amitié qui prend tout son sens ?

Si la Turquie et la Hongrie occupent des positions contrastées au sein de l’architecture européenne - candidate de longue date pour l’une, membre récalcitrant pour l’autre -, leurs politiques étrangères révèlent des convergences frappantes, tant dans leur posture souverainiste que dans leurs orientations de politique étrangère.

Ces ressemblances reposent sur des contextes historiques et culturels partagés, notamment leurs origines issues d’empires déchus, l’Empire ottoman pour la Turquie et l’Empire austro-hongrois pour la Hongrie. Depuis l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne (UE) en 2004, le pays a connu une dérive autoritaire sous son Premier ministre Viktor Orbán, illustrée par des réformes contestées sur les médias et la justice. De son côté, la Turquie, engagée dans des négociations d’adhésion depuis 2005, adopte des mesures souverainistes et nationalistes, en particulier après le coup d’État avorté de 2016, qui a conduit à des purges massives et au durcissement du régime sous la férule du président Recep Tayyip Erdoğan.
Ainsi, la relation entre les deux pays est aujourd’hui devenue un partenariat fondé sur des intérêts et des héritages impériaux communs et le partage d’une approche autoritaire de la gouvernance. Cette approche est notamment marquée par des restrictions sur les libertés civiles et un contrôle renforcé des médias à la fois en Hongrie, membre de l’UE et en Turquie, toujours en quête d’adhésion. Le centenaire de l’amitié magyaro-turque, célébré par la Hongrie en 2023, a mis en scène leur proximité culturelle : les deux dirigeants ont participé à des cérémonies symboliques comme l’inauguration du mausolée de Gül Baba à Budapest, symbole des racines turciques du pays. La coopération est matérialisée par de nombreux accords bilatéraux, notamment dans le domaine de l’énergie : une partie de l’approvisionnement énergétique hongrois dépend la Turquie, grâce au gazoduc Turkstream. Les visites officielles réciproques et les accords économiques témoignent d’une volonté d’établir un partenariat solide, allant au-delà de la simple coopération symbolique. Ces deux pays, perçus comme des « marges » politiques de l’UE, remettent donc en question les normes démocratiques établies tout en consolidant des relations bilatérales stratégiques. Cette réalité soulève des questions sur la nature durable et viable de leur alliance, et les implications qui en découlent.
Thelma Lorentz est étudiante en Master 2 de relations internationales, dans le cadre du parcours cohabilité par l’université Paris-Panthéon-Assas et Sorbonne Université. Spécialisée dans l’analyse stratégique du Moyen-Orient et de la Turquie, s’oriente vers une carrière dans la diplomatie ou l’analyse stratégique. Un double séjour Erasmus en Turquie et en Hongrie lui a permis d’approfondir sa connaissance de leurs politiques étrangères respectives, à l’origine de cette note.
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