Les défis de la diplomatie indienne au Moyen-Orient. Entre solidarité historique et intérêts stratégiques

Lorsque le Hamas a lancé son attaque sans précédent contre Israël le 7 octobre 2023, tuant 1 200 personnes, le Premier ministre indien Narendra Modi, comme la plupart des dirigeants mondiaux, l’a immédiatement condamnée et exprimé sa « solidarité avec Israël en cette heure difficile ». Mais l’approche du gouvernement Modi dans les jours et les semaines qui ont suivi l’a distingué de nombreux autres pays du « Sud global » qui ont vivement critiqué l’offensive israélienne à Gaza qui a eu lieu ensuite.

Cette divergence comprend notamment l’abstention de l’Inde lors du vote du 27 octobre 2023 sur une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies (AGNU) appelant à une « trêve humanitaire2 » (120 pays ont voté pour). Plus récemment, le 12 juin 2025, l’Inde s’est à nouveau abstenue lors du vote d’une résolution de l’AGNU appelant à un « cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent de toutes les parties » à Gaza. Cette résolution exigeait qu’ « Israël lève immédiatement le blocus de Gaza et ouvre tous les points de passage frontaliers à l’acheminement de l’aide humanitaire ». L’Inde figurait parmi les 19 pays qui se sont abstenus et était le seul pays d’Asie à le faire.
L’approche de l’Inde depuis presque deux ans a surpris de nombreux observateurs pour diverses raisons. Premièrement, le silence relatif du gouvernement indien sur le sort des Palestiniens à Gaza, alors que le bilan dépasserait les 57 000 morts, marque une rupture avec son soutien traditionnel aux Palestiniens depuis 1948. Même dans un passé récent, alors que l’Inde et Israël développaient des liens commerciaux et de défense, le soutien de New Delhi à Israël était tempéré par ses liens historiques avec la cause palestinienne. Deuxièmement, à travers sa présidence du G20 en 2023, l’Inde a manifesté son ambition de représenter la voix du « Sud global » et de veiller à ce que les préoccupations de ce groupe soient entendues, notamment dans le cadre des conflits mondiaux.
Pour mieux comprendre ces atermoiements de la diplomatie indienne depuis le 7 octobre 2023, ce Briefing retrace la position historique de l’Inde vis-à-vis du conflit israélo-palestinien depuis 1948 lorsque l’Inde avait décidé de soutenir presque sans équivoque la cause palestinienne et maintenu ses distances avec le nouvel État d’Israël. La position indienne a toutefois évolué : d’abord avec la fin de la guerre froide et l’établissement de relations diplomatiques avec Israël en 1992, puis encore avec l’élection du Premier ministre Narendra Modi en 2014, qui a toujours soutenu Israël et surtout son Premier ministre Benyamin Netanyahou. Enfin, nous discuterons comment l’évolution de la situation depuis le 7 octobre 2023 a accentué les difficultés de la diplomatie indienne à trouver un équilibre dans ses relations avec le Moyen-Orient.
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Points clés
La diplomatie indienne, autrefois fortement sensible à la cause palestinienne, adopte depuis l’avènement de Narendra Modi une posture plus favorable à Israël, marquée par une coopération sécuritaire renforcée.
Depuis le 7 octobre 2023, New Delhi affiche une position ambiguë, condamnant le Hamas mais restant prudente sur la réponse israélienne à Gaza. L’Inde s’est notamment abstenue lors de plusieurs votes à l’ONU sur Gaza, se distinguant ainsi de la majorité des pays du « Sud global » .
Les réactions des États latino-américains à la guerre à Gaza remettent en question l’idée selon laquelle il y aurait une position homogène du « Sud global » articulée autour de l’émancipation et l’autonomie. Ce dernier s’apparente davantage à un « fait géopolitique » qu’à un groupe homogène.
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