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COP28: Pourquoi la demande de pétrole va continuer d'augmenter dans les années à venir

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cité par Timothée Talbi sur 

  BFM Business
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Si l'Agence internationale de l'énergie prévoit un pic de la demande mondiale de pétrole cette décennie, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole anticipe une hausse de cette demande de 17% d'ici à 2045.

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C'est l'un des grands enjeux de la COP28 qui s'ouvre ce jeudi à Dubaï. Les quelque 200 pays présents vont-ils parvenir à s'accorder sur des engagements de réduction de l'utilisation de pétrole dans le texte final de la conférence des Nations unies sur le changement climatique?

Il y a deux ans à Glasgow, les pays avaient accepté d'abandonner progressivement l'utilisation du charbon mais cet objectif n'avait pas été appliqué à l'ensemble des combustibles fossiles comme le gaz et l'or noir. Un obstacle dans la lutte contre le changement climatique alors que 15% des émissions mondiales sont liées à l'énergie résultant de la production, du transport et de la transformation du pétrole et du gaz.

Bien que les Etats-Unis et l'Union européenne poussent en faveur d'engagements élargis à l'ensemble des combustibles fossiles dans l'accord final de la COP28, les pays du G20 ne se sont pas alignés sur le sujet et la Russie s'oppose même à de telles mesures. Plusieurs pays dont l'économie dépend des combustibles fossiles plaident plutôt en faveur des technologies de capture et stockage de CO2 ou le développement des capacités en matière d'énergies renouvelables afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique.

Mais une action sur le levier des hydrocarbures est en réalité inévitable pour atteindre la neutralité carbone en 2050, une condition pour garder l'objectif de 1,5°C à portée de main. Dans cette optique, la consommation de pétrole et de gaz doit diminuer de plus de 75% à cet horizon selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

Un pic de demande avant 2030 selon l'AIE, une croissance plus durable de la consommation pour l'Opep

Cependant, la demande pétrolière est toujours forte et le restera dans les années à venir. Toujours d'après les chiffres de l'AIE, elle devrait atteindre un niveau record de 102 millions de barils par jour en 2023, marque qu'elle devrait élever à 103 millions de barils par jour l'année prochaine.

Après une hausse annuelle de 2,4 millions de barils par jour portée par l'appétit de la Chine pour l'or noir, la croissance globale de la demande devrait ralentir à 930.000 barils par jour en 2024 sous l'effet de gains d'efficacité énergétique, de l'essor des véhicules électriques, et les effets du rebond économique post-Covid commençant à se dissiper. Mais l'AIE pointe du doigt une soif d'énergies fossiles qui reste trop grande pour respecter les objectifs climatiques malgré le bond en avant "phénoménal" des énergies propres.

Et l'agence anticipe même une poursuite de la hausse de la consommation jusqu'à un pic qui devrait survenir durant la décennie, en raison paradoxalement de la croissance "spectaculaire" des technologies énergétiques plus propres et des voitures électriques. L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) va plus loin et prévoit quant à elle une augmentation de la demande mondiale de 17% d'ici à 2045 par rapport à 2022. Dans le détail, elle bondirait à 106,1 mb/j (million de barils par jour) en 2025, 112 en 2030 avant de connaître une hausse plus modérée à partir de 2035, passant de 114,4 mb/j à 116 mb/j en 2045.

Une demande mondiale soutenue par l'Asie​

D'après l'Opep, la demande dans les prochaines décennies sera tirée par les pays non membres de l'OCDE avec l'Inde comme principale moteur, alors qu'elle déclinera à partir de 2025 dans la zone OCDE. Conseiller du centre énergie de l'Institut français des relations internationales (IFRI), Olivier Appert explique cette dichotomie par des situations démographiques et de développement différentes: "Les pays hors OCDE ont besoin d'énergie pour leur population qui augmente et dont le niveau de vie progresse également à l'image de l'Inde ou de plusieurs pays africains." Il insiste notamment sur la Chine qui contribue à la moitié de la hausse de la demande de pétrole et dont la consommation d'or noir a été multipliée par trois entre 2000 et 2021.

Malgré les discours portés par Pékin, l'ancien président du Conseil français de l'énergie estime que l'Empire du Milieu ne donne pas la priorité à la réduction des émissions de gaz à effet de serre mais plutôt à ses ambitions de leadership économique mondial avec un objectif daté symbolique: le centenaire de la République populaire de Chine en 2049.

Par ailleurs, ce dernier rappelle que l'identité du prochain président américain pourrait avoir une incidence majeure sur l'orientation de la consommation de pétrole des Etats-Unis, déjà premier producteur mondial d'or noir.

L'Europe doit jouer un rôle de locomotive

A la tête de l'Union française des industries pétrolières (UFIP), Olivier Gantois se range du côté des prévisions de l'AIE qui envisagent deux grands scénarios à l'horizon 2050. Le premier, davantage pessimiste, prévoit une poursuite des dynamiques actuelles qui permettrait de réduire faiblement la demande mondiale à 90 millions de barils par jour tandis que le second répondrait à l'objectif du "net zero" en divisant par quatre la consommation mondiale de pétrole (autour de 25 millions de barils par jour). S'il admet que la région asiatique et plus particulièrement la Chine continue de porter la demande pétrolière, il insiste sur les engagements pris par Pékin pour atteindre la neutralité carbone d'ici 2060.

Le président de l'UFIP estime qu'une baisse de la consommation de pétrole ne peut pas passer par une contraction de l'offre qui répond à une demande: "Globalement, la production pétrolière équilibre toujours la demande. Les compagnies ajustent la production en fonction des projections de demande."

Une analyse qui fait écho à l'annonce faite en septembre par Totalenergies d'une hausse de sa production d'hydrocarbures de 2 à 3% par sur les cinq prochaines années afin de répondre à la demande des pays émergents. Plus récemment, c'est le géant pétrolier émirati ADNOC, dont le PDG Sultan Al-Jaber préside la COP28, qui a annoncé prévoir 150 milliards de dollars d'investissements jusqu'en 2027 pour accroître sa capacité de production.

Des compagnies pétrolières incitées à investir

Sultan Al-Jaber argue que son pétrole est moins cher et moins carboné, en raison d'une extraction plus simple, que celui d'autres régions du monde, et qu'Adnoc ne fait pour l'instant qu'augmenter la capacité d'extraction, non la production elle-même, afin de se préparer à répondre à la demande future à l'instar de Totalenergies. Il martèle que les combustibles fossiles ne pourront être abandonnés que lorsque suffisament d'énergies renouvelables pourront les remplacer. De son côté, l'Opep juge que la demande pétrolière ne pourra être comblée qu'au prix d’investissements dans le secteur pétrolier d’ici 2045 estimés à 14.000 milliards de dollars, soit environ 610 milliards de dollars en moyenne par an. "Les appels à arrêter les investissements dans de nouveaux projets sont malavisés et pourraient conduire au chaos énergétique et économique", selon Haitham Al Ghais.

Si Olivier Gantois assure du maintien des investissements conséquents des adhérents de l'UFIP dans des projets d'énergies propres, Olivier Appert ne cache pas son scepticisme quant à l'issue de la COP28:

"Des grandes décisions sont prises mais la réalité est toute autre. Est-ce que l'accord final sera appliqué par Trump s'il est réélu, par le nouveau président argentin ou le potentiel prochain premier ministre néerlandais? Les pays européens peuvent signer sans problème un accord de réduction de la production de pétrole mais tant qu'il n'y a pas une position ferme et des mesures claires, ce n'est pas l'ONU qui va imposer à la Russie ou l'Arabie saoudite une réduction de la production."

 

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Olivier APPERT

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Conseiller, Centre énergie et climat de l'Ifri