07
juin
2022
Espace Média L'Ifri dans les médias
Michaël LEVYSTONE, cité par Manuel Fernández pour Atalayar

Le Kazakhstan adopte un référendum constitutionnel quelques mois après les émeutes de janvier

Le président Tokayev promet un "nouveau Kazakhstan" et met fin à l'ère de l'ancien président Nazarbayev, mais ses détracteurs l'accusent de procéder à des réformes cosmétiques pour renforcer son pouvoir. 
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Une majorité de l'électorat kazakh a voté en faveur du référendum constitutionnel de dimanche, qui, selon le président Kassym-Jomart Tokayev, vise à faire passer le pays "d'un système "superprésidentiel" à une république présidentielle dotée d'un parlement fort". 

Les résultats préliminaires, annoncés par la Commission électorale centrale, ont montré que 77,18 % des électeurs ont soutenu le projet, avec une majorité dans toutes les régions du pays, contre 18,66 % qui ont voté contre. "Le référendum a été validé", a annoncé Nurlan Abdirov, président de la Commission. 

Avec ce vote, les citoyens du pays ont apporté leur soutien à une série d'amendements constitutionnels proposés par Tokayev, dans ce qu'il a qualifié de "nouvelle ère dans l'histoire du Kazakhstan indépendant", avec une évolution vers une "deuxième république" et un "nouveau Kazakhstan", qui pourrait marquer une rupture avec l'ère de l'ancien président Nursultan Nazarbayev. 

 

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La "Deuxième République"

Le président ne pourra plus être membre d'un parti politique, ce qui signifie une perte d'influence pour le parti Amanat au pouvoir (connu il y a quelques mois encore sous le nom de Nur Otan). En outre, ses proches ne seront plus autorisés à occuper des fonctions politiques ou à diriger des entreprises publiques, une mesure destinée à limiter le népotisme, endémique sous la présidence de Nazarbayev.

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Plus important encore, les amendements suppriment toute référence à Nazarbayev dans la Constitution, le privant ainsi des privilèges spéciaux dont il bénéficiait en tant qu'Elbasy et "premier président". Depuis janvier, Nazarbayev, que l'on a vu voter au référendum, a gardé un profil bas, semblant confirmer sa perte d'influence au profit de Tokayev, et maintenant ces amendements pourraient être le clou final de son cercueil.

Pour Michaël Levystone, chercheur à l'Institut français des relations internationales, éviter précisément les dérives de l'ère Nazarbayev serait l'objectif affiché de la réforme, avec des mesures concrètes pour faire face aux risques de népotisme et d'autocratie. 

"La révision constitutionnelle au Kazakhstan est donc très fortement marquée d’une volonté de    « déelbassiser » le pays, qu’illustre le retrait programmé de son statut de Père de la Nation", déclare Levystone

 

Une rupture avec le passé ou un changement cosmétique ? 

Cependant, le référendum a également été sévèrement critiqué par certains opposants, qui n'y voient qu'un "changement cosmétique".

Levystone rappelle que le référendum apporte avec lui un certain nombre de réformes fondamentales, mais que, dans le même temps, le président continuera à disposer de pouvoirs étendus, de la direction des forces armées à la nomination des hauts fonctionnaires du pays. 

"L’abandon, annoncé par les autorités kazakhstanaises, d’un régime « super-présidentiel » ne saurait faire oublier que le président restera extrêmement puissant dans le pays (malgré de réels gages d’ouverture politique)", Levystone argumente.

Ainsi, selon le chercheur de l'Ifri, "le séduisant concept de « Nouveau Kazakhstan » ne se concrétise qu’imparfaitement dans la révision constitutionnelle qui se prépare à Nour-Soultan". 

En outre, conclut Levystone, "l'opinion publique kazakhstanaise s'attend à de profonds changements socio-économiques dans le pays", ce qui signifie que le "nouveau Kazakhstan" ne peut être exclusivement politique.

 

> L'article en intégralité sur Atalayar.

Mots-clés
Constitution Référendum constitutionnel réformes Asie Centrale Kazakhstan