La France et l’Asie : l’ébauche d’un « pivot » à la française ?
À l’instar des États-Unis, la France a, elle aussi, engagé un « pivot » vers l’Asie. Il se décline en deux axes principaux : la recherche de nouveaux débouchés commerciaux d’une part, la diversification et l’approfondissement des partenariats stratégiques de l’autre. Ces deux axes s’entrelacent dans une vision globale cherchant à assurer à la France une place stratégique en Asie-Pacifique.
Pendant longtemps, l’Asie a été considérée comme un moyen de faire valoir l’engagement français en faveur d’un système international multipolaire, et non comme un enjeu stratégique en soi. L’Asie n’a d’ailleurs généralement pas été perçue en tant qu’ensemble régional, et seuls les « grands » pays asiatiques ont intéressé le Général de Gaulle et ses successeurs. Pourtant, la croissance économique de la région et les processus d’intégration régionale ont permis à l’Asie de s’affirmer comme pôle structurant des relations internationales.
L’importance et la multiplicité des enjeux posés par l’émergence de l’Asie sur la scène internationale en font un élément essentiel pour la politique étrangère de la France. L’idée du « pivot » cherche à reconnaître cette évolution. Cependant, contrairement au rebalancing américain, le « pivot » français ne s’accompagne pas d’un redéploiement militaire dans la région. La France n’a pas opéré de désengagement de son « pré carré » au profit d’une nouvelle politique asiatique. Les enjeux du « pivot » français vers l’Asie sont d’abord économiques. L’activisme diplomatique déployé dans la région sert les objectifs de la diplomatie économique et doit être appréhendé dans un cadre plus large : celui de la réadaptation du réseau diplomatique français au contexte géopolitique mondial.
Les discours officiels qui relaient le terme de « pivot » comme nouvel axe de politique étrangère française, cherchant à investir un continent auparavant négligé, doivent être mis en perspective. La politique asiatique de François Hollande ne marque pas de réelle rupture avec le passé, et les moyens déployés à son service ne permettront sans doute pas à la France de devenir un réel acteur sur la scène asiatique. En outre, parler de « pivot » vers l’Asie lorsque les contraintes budgétaires limitent les capacités de projection de la France peut paraître inadéquat. Malgré des discours volontaristes présentant d’ambitieux objectifs, l’avenir de la politique étrangère française en Asie apparaît finalement bien incertain.
Hadrienne Terres a été collaboratrice au Centre Asie de l’Ifri de septembre 2014 à mars 2015.
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