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« La libération de Cécile Kohler et Jacques Paris ne signifie pas la fin de la diplomatie des otages »

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  L'Orient-Le Jour 

 
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Détenus depuis plus de trois ans en Iran, dont une grande partie dans la prison d’Evin à Téhéran, les Français Cécile Kohler et Jacques Paris ont été libérés sous condition mardi 4 novembre. Ils se trouvent actuellement à l’ambassade de France dans la capitale iranienne, où ils attendent l’autorisation de quitter le territoire de la République islamique. 

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Drapeaux de la France et de l'Iran_bis
Drapeaux de la France et de l'Iran
Vitalii Vodolazskyi/Shutterstock.com
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Le couple d’enseignants syndicalistes avait été arrêté en mai 2022 après avoir rencontré des professeurs grévistes iraniens, avant d’être accusés d'espionnage. Leur libération survient dans un contexte de tensions accrues, depuis le rétablissement des sanctions contre l’Iran et les pressions exercées par les États-Unis de Donald Trump pour parvenir à un accord sur le nucléaire avant la fin de l’année. 

Clément Therme, chercheur associé à l’Institut français des relations internationales et spécialiste du monde iranien, fait le point pour L’Orient-Le Jour. 

Comment expliquer le calendrier de leur sortie de prison ?

Depuis le mois de septembre, la partie iranienne mettait en avant la possibilité d’un échange de prisonniers entre la France et l’Iran, souhaitant voir la libération de la ressortissante iranienne Mahdieh Esfandiari, placée en détention provisoire pour apologie du terrorisme depuis février en France, et considérée comme « otage » à ses yeux. Or, Mahdieh Esfandiari a été libérée et placée sous contrôle judiciaire le 22 octobre, dans l’attente d’être jugée en janvier 2026. En termes de dates, la libération de Jacques Paris et Cécile Kohler est concomitante, mais de son côté, Paris ne reconnaît pas d’échange, car ne conçoit pas Mahdieh Esfandiari comme une otage. 

Nous assistons à une guerre informationnelle lancée par les médias officiels de la République islamique, qui mettent en scène une symétrie entre la situation d’une prisonnière iranienne en France et la situation d’otages français en Iran, afin de décrédibiliser le récit sur la spécificité du régime iranien quant à la prise d’otages. L’Iran tente ici de créer un contre-récit à celui de la diplomatie des otages, que pratique le régime depuis 1979 et la prise d’otage de l’ambassade américaine à Téhéran. Ainsi, la République islamique peut continuer à pratiquer la diplomatie des otages, tout en niant sa réalité. 

Est-ce que cette libération préfigure une potentielle détente entre Européens et Iraniens ? 
Historiquement, il n’y a pas de lien direct entre les libérations d’otages et des phases de détente. Il peut y avoir des arrestations et des libérations en période de détente, comme dans des phases de tension. Certes, on peut noter un rythme plus soutenu de prises d’otages dans des périodes où les tensions sont accrues. Mais la libération de Cécile et Jacques ne signifie pas la fin de la diplomatie des otages. On compte encore près de 20 otages européens dans les prisons iraniennes. 

Dans quelle mesure la libération des deux Français pourrait-elle mener à des avancées sur le dossier nucléaire ? 
Les otages peuvent être inclus dans une négociation autour du nucléaire. Il y a un lien qu’on ne peut pas nier, mais qui n’est pas exclusif. Officiellement, le Quai d’Orsay compartimente les dossiers, et dit ne pas mélanger les efforts de libération des otages avec les négociations. Il n’y a pas eu de reprise de négociations depuis la guerre des 12 jours en juin dernier, parce que les États-Unis veulent une négociation qui aille au-delà du nucléaire et qui inclut la question des missiles et de leur portée. C’est un des problèmes fondamentaux qui empêche la réalisation d’un nouvel accord, alors que l’Iran veut limiter les termes de l’accord au nucléaire.

Et aujourd’hui, les Européens ne cherchent pas à jouer un rôle distinct des États-Unis car ils partagent les mêmes objectifs, la seule nuance portant sur la méthode. Les Européens n’ont en tout cas pas la capacité d’influencer la position américaine ni la position iranienne. Depuis l’activation du snapback en octobre, l’Europe n’a plus le rôle de « bon flic » qu’elle a pu avoir au temps de George W. Bush et de l’administration néoconservatrice américaine, qui représentait plutôt le « mauvais flic ».

>Lire l'interview sur le site L'Orient-Le Jour

 

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Clément Therme

Clément THERME

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Chercheur associé, Programme Turquie/Moyen-Orient de l'Ifri

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