Celle-ci se définit comme la capacité à acquérir et exploiter une connaissance géolocalisée et en temps quasi réel d’un environnement opérationnel donné, garantie par une architecture de connectivité mettant en réseau des capteurs hétérogènes et redondants, des systèmes de traitement de données de masse et des effecteurs.
Cependant, la clarté visuelle acquise par la technologie ne garantit pas pour autant la clarté cognitive qui permettrait de comprendre les intentions de l’adversaire, voire de prédire ses actions. Ainsi, cette étude propose une approche raisonnée de la transparence, qui tient compte de la dialectique permanente entre transparence et opacité, entre connaissance et ignorance. À ce titre, la transparence doit être considérée comme le fruit d’une lutte pour la maîtrise de la supériorité informationnelle. Elle est avant tout une potentialité à conquérir, défendre ou interdire, au même titre que les supériorités de milieu.
La nécessité de savoir a toujours fait partie des besoins fondamentaux du chef militaire. Cette quête de la connaissance a bénéficié de l’évolution des techniques, garantissant progressivement au chef tactique une visibilité croissante de son environnement opérationnel. Au début du XXIe siècle, la révolution de la connectivité a ouvert un nouveau pan de l’histoire militaire, donnant corps à l’ambition de déchirer le brouillard de la guerre. Portant les promesses d’un nouvel art de la guerre qui reléguerait aux oubliettes les anciens principes et procédés, cette transparence inédite a pourtant généré ses propres illusions : la perfection de la connaissance, l’instantanéité décisive des effets, la fin de la friction… Remise à sa juste place, la transparence apparaît comme le résultat espéré d’un modèle capacitaire conçu autour de la donnée, articulé à partir d’un réseau de connectivité organisé pour capter, fusionner, stocker et diffuser cette donnée.
Décuplant la létalité du champ de bataille terrestre, mettant fin à la protection des zones arrière, interrogeant les principes mêmes de discrétion dans tous les milieux et champs, de dissimulation, de concentration des forces et de surprise tactique, la transparence remet en cause un certain nombre d’acquis du combat.