Pourquoi les démocrates américains ne font plus rêver ?
Laurence Nardon est l'invitée du podcast "Tout un monde" pour parler du futur du Parti démocrate.
Concernant la fin du shutdown et les "huit sénateurs qui ont baissé les yeux dans un duel de cowboys face aux républicains", Laurence Nardon souligne que, dans la perspective des élections de mi-mandat, certains estiment qu’il valait peut-être mieux laisser les républicains apparaître comme "les méchants de l’affaire", ceux qui auraient supprimé l’aide aux assurances santé pour l’ensemble des ménages américains. Selon elle, "la vraie question, c’est celle de la division profonde et encore irrésolue au sein du Parti démocrate".
En effet, le parti se divise aujourd’hui entre "une aile radicale très à gauche, incarnée par Mamdani", et "le courant des Biden à l’ancienne", représenté notamment par les deux gouverneures récemment élues dans le New Jersey et en Virginie. Depuis Barack Obama, "le Parti démocrate n’a pas su faire émerger de nouveaux visages", ce qui rend incertaine la question de savoir qui pourra diriger le parti à l’approche des prochaines présidentielles.
La stratégie de Mamdani, centrée sur des problématiques concrètes du quotidien plutôt que sur de grandes notions abstraites, semble néanmoins prometteuse. Les démocrates ont "tellement souffert du rejet des Américains sous Biden, en raison de l’inflation, à une époque où il prônait la démocratie et d’autres idéaux abstraits, qu’ils se recentrent désormais sur le coût de la vie", un sujet bien plus proche des préoccupations de l’électorat. Toutefois, les mesures portées par Mamdani, jugées très à gauche, offrent aux républicains "un angle d’attaque très efficace" puisqu'"ils vont pouvoir crier au communisme", souligne la chercheuse. Elle nuance d’ailleurs cette réussite new-yorkaise : si ces propositions ont séduit les électeurs de la ville, elles pourraient "effrayer le reste des Américains".
Le parti fait également face à un véritable problème de mobilisation. Cependant, Laurence Nardon rappelle que l’année 2026 sera marquée par "des scrutins locaux, donc des enjeux locaux", susceptibles de susciter une meilleure participation qu’une élection présidentielle, dont les enjeux sont souvent perçus comme "plus lointains" par les électeurs.
La "vague bleue" observée début novembre représente un signe encourageant. Malgré tout, certains démocrates redoutent qu’elle n’incite Donald Trump à redoubler d’efforts pour influencer le scrutin national à venir. Celui-ci a déjà critiqué le vote par correspondance et "la présence de la Garde nationale dans certaines villes pourrait viser à décourager les électeurs de se rendre aux urnes". Laurence Nardon avertit : "ces tactiques pourraient s’intensifier l’année prochaine".
Évoquant ensuite l’affaire Epstein, elle la décrit comme "l’une des rares affaires qui fait réellement peur à Donald Trump". Le trafic sexuel de mineurs étant au cœur de nombreuses théories du complot d’extrême droite, "attribuer ce type de scandale à Trump ou à son entourage peut lui être très dommageable auprès de sa propre base".
Enfin, Laurence Nardon évoque la perspective d’un "duel probable entre Marco Rubio et J.D. Vance, deux personnalités montantes du camp républicain", en vue des primaires pour l’élection présidentielle de 2028.
Texte citation
Face à Trump, un génie de la communication avec un charisme spectaculaire auprès de sa base, les démocrates devraient trouver une figure avec un charisme similaire. [...] Aux États-Unis, [les élections] marchent beaucoup par la personnalisation du scrutin, les idées viennent après.
Responsable du Programme Amériques de l'Ifri
> Écouter le podcast sur le site de RTS.
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