La politique russe d’Emmanuel Macron : étapes et racines d’une nouvelle approche, 2017-2024
La France tient vis-à-vis de la Russie une position ambivalente depuis des décennies, une position en partie fondée sur des mythes, des projections et des ambitions peu réalistes.
Les deux pays se sont historiquement et principalement perçus comme des appuis, voire des alliés potentiels, dans des rivalités respectives sur le continent européen et ailleurs dans le monde. Toutefois, la relation franco-russe a progressivement connu une forme de « banalisation » sous les présidences de Nicolas Sarkozy et, surtout, de François Hollande.
Si Emmanuel Macron a cherché à poursuivre la politique de « dialogue et de fermeté » de son prédécesseur, il a aussi prôné, comme Barack Obama en 2009, une politique de reset avec la Russie. Les efforts du président français ont été largement vains, symboliques et unilatéraux, en partie parce qu’il a sous-estimé la fragilité et les faibles perspectives structurelles de la relation franco-russe, ainsi que l’expérience de ses prédécesseurs et les intentions et la culture politico-stratégique de la Russie
Cependant, dès 2022-2023, la politique russe d’Emmanuel Macron a connu une profonde mutation. Le changement d’approche très progressif du président français est le fruit d’une triple prise de conscience : celle de la radicalité de la politique russe et de la nécessaire adoption d’une posture plus dure pour peser dans le rapport de force ; celle de s’être bercé d’illusions dans sa relation avec Vladimir Poutine ; et, surtout, la prise de conscience que sa politique russe compromettait son projet européen et la crédibilité de la France en Europe.
Si la nouvelle approche d’Emmanuel Macron semble plus cohérente, les divergences de vues avec les partenaires européens – notamment l’Allemagne – et la réticence de la France à investir massivement dans son industrie de défense la rendent incertaine.
Dimitri Minic est chercheur au Centre Russie/Eurasie de l’Ifri. Il est docteur en histoire des relations internationales de Sorbonne Université (2021). Sa thèse de doctorat s’intitule « Contourner la lutte armée : la pensée stratégique russe face à l’évolution de la guerre, 1993-2016 ». Ses recherches portent sur la pensée stratégique russe, l’armée russe et les capacités hybrides et de haute intensité russes. Il travaille également sur la culture stratégique des élites politico-militaires russes et la perception des menaces. Il a récemment publié :
- « Que pense l’armée russe de sa guerre en Ukraine ? Critiques, recommandations, adaptations » (Ifri, septembre 2023)
- « How the Russian Army Changed its Concept of War, 1993-2022 » (Journal of Strategic Studies, mai 2023).
Il est également l’auteur de Pensée et culture stratégiques russes : du contournement de la lutte armée à la guerre en Ukraine (Paris, Maison des sciences de l’homme, avril 2023), pour lequel il a reçu le Prix Thibaudet.
> Retrouvez la version originale de cet article en anglais sur le site du Zentrum Liberale Moderne : « Emmanuel Macron’s Russian policy: stages and roots of a new approach »
Contenu aussi disponible en :
Régions et thématiques
ISBN / ISSN
Utilisation
Comment citer cette étudePartager
Téléchargez l'analyse complète
Cette page ne contient qu'un résumé de notre travail. Si vous souhaitez avoir accès à toutes les informations de notre recherche sur le sujet, vous pouvez télécharger la version complète au format PDF.
La politique russe d’Emmanuel Macron : étapes et racines d’une nouvelle approche, 2017-2024
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesRussian Strategic Thinking and Culture Before and After February 24, 2022: Political-Strategic Aspects
Rédigé par Dimitri Minic, l'article scientifique "Russian Strategic Thinking and Culture Before and After February 24, 2022: Political-Strategic Aspects" a été publié dans "Russia’s war against Ukraine : Complexity of Contemporary Clausewitzian War" par le département de la guerre de l'Université Nationale de Défense d'Helsinki en 2024.
La Russie et les nouveaux membres des BRICS : opportunités et limites d'une coopération scientifique et technologique
À l’issue du 15e sommet des BRICS, qui s’est tenu du 22 au 24 août 2023 à Johannesburg (Afrique du Sud), il a été décidé d’inviter six nouveaux pays à rejoindre cette alliance : l’Argentine, l’Égypte, l’Iran, les Émirats arabes unis (EAU), l’Arabie saoudite et l’Éthiopie. En 2024, tous ces pays à l’exception de l’Argentine sont devenus membres des BRICS+. Il est probable que l’adhésion de ces nouveaux pays, outre des avantages politiques et économiques, contribue à leur développement scientifique et technologique.
Caucase du Sud, un nouvel échiquier stratégique ?
Les États du Caucase du Sud cherchent à déterminer leur place sur une scène internationale de plus en plus fragmentée.
Pourquoi le gouvernement géorgien fait-il le choix de la Russie ?
Le discours prononcé le 29 avril 2024 par le milliardaire Bidzina Ivanishvili, dirigeant officieux de la Géorgie, a été largement perçu dans le pays et à l’étranger comme un tournant dans l’orientation géopolitique du pays.