Milei : rompre avec l'État

L’élection de Javier Milei en novembre 2023 met un coup d’arrêt brutal à cinquante ans d’une démocratie argentine toujours marquée par le souvenir de Juan Perón et fidèle au principe de la légitimité de l’État.

Que ce soit avec les politiques néolibérales de Carlos Menem (qui conduisent à la faillite de 2001) et de Mauricio Macri, ou avec les politiques de centre gauche néo-développementalistes des Kirchner et d’Alberto Fernandez, le pays n’a pas su corriger sa tendance marquée à l’inflation. S’ajoutent à partir des années 2010, de nouveaux problèmes liés à l’insécurité, à la précarisation de l’emploi, à une corruption généralisée dans la fonction publique et les entreprises publiques et enfin, en 2020-2021, à des mesures anti-Covid extrêmement impopulaires.
C’est dans ce contexte que Javier Milei entre en politique. Économiste séduit par les thèses libertariennes de Murray Rothbard, il va capitaliser sur l’exaspération des jeunes des classes populaires urbaines. Les électeurs de Milei sont à la fois en colère contre les maux du pays, dont ils rendent coupables les élites politiques argentines tous partis confondus ; mais aussi dans l’espoir d’une réussite professionnelle due au développement personnel (mejorismo), en dehors de toute assistance de la puissance publique.
Milei leur propose un démantèlement massif de l’État (avec sa tronçonneuse), ainsi qu’une vision ultra-réactionnaire de la société. Son programme contient peu de propositions en matière d’identité et d’immigration, car ces questions ne sont pas aussi prégnantes dans le contexte latino-américain que dans les extrêmes droites occidentales. Appuyé sur un style et une communication anti-système « à la Trump » tout à fait dans l’air du temps, Milei est élu en 2023 avec 56 % des suffrages.
Après bientôt deux ans de pouvoir, le bilan de Milei est mitigé pour ses partisans comme pour ses adversaires. Il a engagé une réduction drastique de la fonction publique argentine et une attaque en règle contre les droits reproductifs, mais la suite de son combat est freinée par la faiblesse de sa représentation législative. En politique étrangère, Milei suit la ligne de son voisin du Nord, Donald Trump, mais avec un certain pragmatisme. En termes économiques, enfin, on observe des prévisions de croissance encourageantes et la baisse de l’inflation, mais les inégalités sociales et territoriales s’accroissent, tandis que les possibilités de mobilité sociale semblent affaiblies et que l’urgence environnementale est oubliée.
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