Trump à l’ONU : le dérèglement international
Le 23 septembre, Donald Trump prendra la parole à la tribune de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York. Sur fond des débats autour de la reconnaissance de l’État de Palestine, renforcera-t-il la rupture entre Washington et l'organisation, régulièrement prise pour cible ?

Avec :
- Gérard Araud, diplomate français
- Thomas Gomart, historien des relations internationales, directeur de l’Institut français des relations internationales (IFRI).
- Muriel Domenach, ancienne ambassadrice de la France à l'OTAN
Réunie à New York depuis dix jours, l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies poursuit ses travaux dans l’indifférence habituelle. Mais deux évènements, avant sa clôture en début de semaine prochaine, domineront l’agenda international. Lundi, la France et neuf autres pays reconnaîtront officiellement l’État de Palestine, s’ajoutant aux 147 pays qui l’avaient déjà fait. Et mardi, selon la tradition, ce sera au tour du 47ᵉ président des États-Unis de s’exprimer à la tribune.
La vitrine de l’organisation phare du multilatéralisme s’est bien lézardée en 80 ans d’existence. Pourtant, l’institution continue d’offrir au monde la seule scène à sa mesure, le seul reflet de sa globalité et de tant d’enjeux partagés. Cette réunion de l’Assemblée générale révèle aussi, en instantané, la photographie d’un ordre international en plein dérèglement – cet ordre édifié par l’Occident, certes à son profit, reposant sur des règles qui, bon an mal an, organisaient et stabilisaient les rapports de force. On en est loin. Et les paris sont ouverts : quels seront le discours, la posture d’un Donald Trump qui incarne et accélère le fracas d’une politique étrangère américaine en rupture avec les fondamentaux de ses prédécesseurs ?
L’ONU en est la première victime – et surtout ses agences –, tant les États-Unis ont coupé le financement de leurs activités humanitaires et environnementales. Il n’est plus question pour Washington d’apparaître en « leader du monde libre » – cette expression désormais surannée qui suscitait à la fois irritation et réconfort de ce côté-ci de l’Atlantique. Courtisant ses adversaires, négligeant ses alliés, encourageant, sous couvert de liberté d’expression, une extrême droite enhardie dans nos propres pays, le président américain semble fêter avec exubérance le déclin d’un Occident qui a perdu de sa superbe.
Donald Trump n’a toujours pas mis fin aux deux guerres qu’il se flattait de régler en quelques jours – au Proche-Orient et en Ukraine. Mais le voilà qui accueille sur tapis rouge un Vladimir Poutine dont il n’admet toujours pas la responsabilité ; le voilà qui, hier, téléphone à Xi Jinping dans l’espoir d’une prochaine rencontre au sommet ; et voilà l’Europe privée de ses acquêts, contrainte de définir ses propres priorités et de s’en donner les moyens – à supposer qu’il ne soit pas trop tard.
Vers une nouvelle cartographie mondiale
Fin de l’Occident triomphant, certes. Mais quoi d’autre ?
On a vu, il y a quinze jours, autour du président chinois, à Tianjin et à Pékin, la somptueuse mise en scène d’un autre ordonnancement du monde, une « nouvelle gouvernance mondiale », pour reprendre la formulation consacrée. Serait-ce la promesse d’un multilatéralisme renouvelé, à même de séduire tant de protagonistes bousculés par Washington ? « Ils conspirent contre moi », a commenté Donald Trump, mi-figue, mi-raisin.
À l’échelle régionale, et selon les zones d’intérêt, le multilatéralisme prospère. L’Alliance atlantique tient bon, mais l’ambiguïté de certains propos américains la fragilise, au moment où la Russie la défie ouvertement – hier encore, trois MIG-31 ont violé l’espace aérien estonien. Quels sont les autres protagonistes qui pèsent désormais sur la scène internationale ? Quelles sont les particularités de cette nouvelle cartographie du monde ? Comment comprendre ce ballet désarticulé, ces jeux de rôle où nous autres, Européens, avons tant de difficultés à trouver notre place ?
Nos invités :
- Muriel Domenach participe à l’initiative “Au contact citoyens citoyennes !”, conduite avec l'association Fraternité générale et en lien avec l’association des professeurs d’histoire-géographie, qui consiste à déployer des anciens diplomates, militaires et experts défense pour échanger avec des lycéens sur les enjeux géopolitiques et leur impact sur notre société. L'initiative sera présentée aux Rendez-vous de l’histoire à Blois en octobre.
- Gérard Araud a publié l’ouvrage Israël: Le piège de l'Histoire chez Tallandier en mars 2024.
- Thomas Gomart a fait paraître L'accélération de l'histoire. Les nœuds géo-stratégiques d’un monde hors de contrôle chez Tallandier en janvier 2024.
> Écouter le podcast sur le site de Radio France.
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