Dans cet interview, Benjamin Augé décrypte les enjeux de la politique africaine de la Turquie. Il prend appui sur la politique africaine de la Turquie sur le plan économique. Les échanges entre la Turquie et l'Afrique ont en effet drastiquement augmenté depuis ces quinze dernières années : ils sont passés de 3 milliards de dollars à plus de 25 milliards en 2021. 

Pour Benjamin Augé, en Somalie, la politique turque s'est caractérisée par un opportunisme. En 2011, Erdoğan a capitalisé sur le vide laissé par les Occidentaux pour utiliser la Somalie comme vitrine du pouvoir turc. Il y a eu un investissement turc dans tous les secteurs. Les Turcs contrôlent l’aéroport, tandis que l'armée somalienne a bénéficié de formations militaires et d'un renforcement en termes de matériel militaire. 

En Ethiopie, l'objectif pour les Turcs est d'avoir les meilleures relations possibles avec le pouvoir en place, que ce soit avec le président Abiy Ahmed à la tête du gouvernement ou non. Le transfert des écoles de Gülen vers le Maarif a été compliqué, notamment en raison de l'intelligentsia éthiopienne qui était fortement implantée dans les écoles du prévaricateur Fethullah Gülen. Il a finalement été obtenu, en échange de matériel militaire, fourni par la Turquie, destiné à être utilisé dans le cadre de la guerre au Tigré.

La plus grande partie du travail de la diplomatie turque et de son président Erdoğan a consisté, depuis 2016, à détruire méthodiquement les réseaux du prédicateurs Fethullah Gülen en Afrique. Cela concerne notamment les écoles turques, quasiment toutes dans les mains du Hizmet de Gülen jusqu'en 2016, et depuis lors, petit à petit reprises en main par la fondation étatique Maarif. En Ethiopie, ce transfert vers Maarif a été particulièrement difficile contrairement à la Somalie, qui est en position de force avec les gouvernements à Mogadiscio depuis 2011.

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