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Nvidia, l’atout clé des États-Unis dans la guerre technologique contre la Chine

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interviewée par Simon Lesage pour

  Le Parisien 

 
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Avec ses puces dernier cri, l’entreprise américaine Nvidia et ses plus de 4 400 milliards de dollars en bourse, est devenue l’atout majeur des États-Unis pour gagner sa course mondiale à l’IA.

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Nvidia, l’atout clé des États-Unis dans la guerre technologique contre la Chine Mathilde Veilliet Ifri
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Elles tiennent dans la paume d’une main et pourtant elles sont d’une importance stratégique gigantesque. « Elles », ce sont les puces de Nvidia, devenues l’épicentre de la guerre pour la souveraineté technologique qui s’opère entre les États-Unis et la Chine. Si les deux premières puissances mondiales se disputent ce petit objet, c’est parce qu’il est absolument indispensable pour gagner la course qu’elles mènent l’une contre l’autre : celle de l’intelligence artificielle.

« Chaque pays, chaque région, veut être leader dans le secteur de l’IA », explique Mathilde Velliet, chercheuse au centre géopolitique des technologies de l’IFRI. « C’est pour cela qu’il est indispensable de s’approvisionner dans les puces les plus avancées qui sont fabriquées ». Celles de Nvidia, donc. Pour résumer, l’avance technologique de l’entreprise américaine et de ses intermédiaires leur permet de donner naissance à des puces qui calculent toujours plus d’informations, toujours plus vite. Ce dont ont besoin les entreprises du secteur de l’intelligence artificielle.

Et travailler avec les puces dernier cri, c’est s’assurer de garder de l’avance. « Depuis le début, explique Mathilde Velliet, ça a toujours été une question d’avance. L’objectif américain, c’est de maintenir cette avance sur les technologies chinoises ».

Mais dans cette course technologique, les États-Unis sont pris en étau : vendre pour faire du business, booster sa propre industrie de l’IA... mais sans pour autant donner accès à une technologie trop puissante à ses concurrents. En l’occurence, la Chine.

C’est pour cela que depuis le premier mandat de Donald Trump, des séries de restrictions et de limitations sont mises en place pour que la Chine ne puisse accéder aux puces les plus avancées. « C’est toute la difficulté des technologies à double usage, analyse Mathilde Velliet. C’est indispensable commercialement mais aussi sur le plan militaire. Si vos technologies ont trois générations d’avance, forcément, l’avantage militaire est en votre faveur ».

Par exemple, en 2020, l’administration Trump interdit à la seule entreprise capable de fabriquer des puces dernier cri, le taïwanais TSMC, de le faire pour le compte de Huawei, champion technologique chinois.

En 2022, Joe Biden suit peu ou prou la même stratégie, et continue de ceinturer la Chine pour l’empêcher d’avancer trop vite dans le secteur en limitant la capacité des puces vendues à la Chine.

Les États-Unis ont tout de même eu un petit coup de frayeur en janvier 2025 lorsque le modèle de langage chinois Deepseek a été dévoilé. L’entreprise chinoise réussit à mettre sur pied un modèle de langage qui concurrence directement l’américain ChatGPT pour une fraction de son coût économique et énergétique. À ce moment-là, Nvidia perd 590 milliards de dollars de valeur en bourse, la plus importante de son histoire.

En avril 2025, Trump va jusqu’à interdire totalement la vente des puces Nvidia vers la Chine. Plus d’histoire de limitations ou de puces moins puissantes... Jensen Huang, le PDG de Nvidia, se retrouve alors piégé. Pour l’homme d’affaires, ne pas pouvoir vendre à la Chine représente une perte colossale.

« Nous n’avons pas peur de faire la course, clame-t-il sur la chaîne américaine CNBC. Laissez nous faire cette course. C’est le moment pour les États-Unis de comprendre qu’il faut que nous mettions le pied au plancher. Il faut y aller. Nous laisser aller gagner cette course. »

Il finit par convaincre Trump, qui l’autorise à vendre à nouveau ses puces les moins puissantes vers la Chine. Le président exige en retour que 15% des bénéfices réalisés en Chine soient reversés au gouvernement américain. Il veut rendre la Chine « addict » à la technologie américaine justement pour pouvoir la maintenir à distance et l’empêcher de se développer.

La Chine ne peut pas, à l’heure actuelle, se débrouiller toute seule et créer assez de puces suffisamment avancées. Pour preuve, la deuxième version de Deepseek a été reportée plusieurs fois, faute de puces.

Dans l’absolu, le but ultime du régime de Xi Jinping serait d’atteindre l’autosuffisance technologique pour pouvoir créer ses propres puces sans avoir à dépendre de qui que ce soit et surtout d’éviter des soupçons d’espionnage via les puces importées. Lorsque fin juillet 2025, Trump autorise l’exportation de puces H20 moins puissantes vers la Chine, Pékin met aussitôt en garde ses entreprises. Le pouvoir chinois soupçonne les États-Unis d’avoir modifié ses puces à des fins d’espionnage ou de sabotage. En réponse à ces accusations, le chef de la sécurité de Nvidia, David Reber, avait simplement expliqué que son entreprise « n’avait, ni ne devrait avoir de tel dispositifs installés sur ses puces ».

Mais l’accusation ne vient pas complètement de nulle part. Le congrès américain a déjà suggéré l’idée de pouvoir localiser les puces de Nvidia pour vérifier que les plus avancées ne soient pas vendues illégalement en Chine. « Il y a un gros marché noir pour s’approvisionner en semiconducteurs avancés, explique Mathilde Velliet. Bien sûr, en violation complète des restrictions américaines ». Dans une enquête, le Financial Times estime que les entreprises chinoises auraient illégalement acheté pour 1 milliards de dollars de ces puces en l’espace de trois mois.

> Voir la vidéo sur le site du Parisien.

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Simon Lesage

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Mathilde VELLIET

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