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Le projet Scaf - Système de combat aérien du futur –, appelé aussi « avion de combat du futur », bat-il de l’aile ? Lancé en 2017 par Berlin et Paris, rejoints par la suite par Madrid, ce projet européen peine à décoller. Il est pourtant capital, puisqu’il vise à doter ces trois pays, d’ici à 2040, d’un avion chasseur de sixième génération pour remplacer progressivement le Rafale de Dassault et l’Eurofighter, construit en partie par Airbus Defence and Space.

Des tensions entre la France et l’Allemagne, concernant notamment la gouvernance du programme, n’ont de cesse de freiner le processus. Le PDG de Dassault Eric Trappier a notamment fait part cet été de son mécontentement sur la façon dont est piloté le projet. Ce qui commence à agacer les Allemands. De quoi menacer l’existence même du programme ? Voici ce que l’on sait.

Qu’est-ce que le Scaf ?

« Le Scaf repose sur trois piliers, explique à 20 Minutes Léo Péria-Peigné, chercheur au Centre des études de sécurité de l’Ifri (Institut français des relations internationales), spécialisé dans l’armement et l’industrie de défense : un avion chasseur de nouvelle génération [new generation fighter, NGF], des drones et un logiciel ». Il ne s’agit donc pas que d’un avion de chasse, mais d’un « système de systèmes » dont le cœur est un avion de combat multirôle couplé à une armée de drones, et pouvant interagir avec d’autres appareils, « dans le cadre de missions longue portée, le tout étant coordonné par un " combat cloud ", un logiciel partagé, permettant la collaboration de tout cet univers » résume le chercheur.

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Pourquoi le projet peine-t-il à avancer ?

« Dans ce genre de projets, il y a trois étages, explique Léo Péria-Peigné : l’étage politique – la tête ; militaire – le corps ; et industriel – les jambes. C’est déjà un peu compliqué au niveau de l’étage militaire, les armées françaises et allemandes n’ayant pas forcément les mêmes doctrines ni les mêmes besoins, mais c’est encore pire au niveau de l’étage industriel, le projet Scaf ambitionnant de faire collaborer deux entreprises, Dassault et Airbus, qui ont du mal à s’entendre. Or, il faut que ces deux-là travaillent ensemble pour avancer. »

Pour Léo Péria-Peigné, ce serait notamment l’attitude de Dassault qui « commence à crisper les autres partenaires », l’industriel français exigeant d’avoir le "lead" complet du pilier NGF, « s’estimant le seul compétent sur la partie chasseur ». 

« Mais ce pilier représente à lui seul 60 à 80 % de l'ensemble du projet, souligne-t-il. Les Allemands et les Espagnols rétorquent donc qu’il en est hors de question, tant que la France paye autant qu’eux, c’est-à-dire 33 % du projet. »

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Ce n'est pas tout. La France et l’Allemagne n’ayant pas les mêmes besoins, deux visions différentes du programme commenceraient à se faire jour.  
 

« Se pose le problème de la très grande spécificité française, qui ne veut pas qu’un avion de combat mais aussi un avion qui puisse se poser sur un porte-avions ainsi que porter notre arme nucléaire, ce qui ne concerne ni les Espagnols, ni les Allemands », pointe notamment Léo Péria-Peigné.

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Y a-t-il un risque que le projet n’aboutisse pas ?

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« La France a-t-elle vraiment d’autres choix que de s’entendre avec ses partenaires si elle veut développer un programme de chasseur de nouvelle génération ?, interroge Léo Péria-Peigné. Je ne le pense pas. » 

« On a déjà raté une étape vu que le Rafale est un avion de quatrième génération, en retard donc par rapport au F-35, un avion de cinquième génération, développe-t-il. Si on ne fait pas le Scaf, on va encore en rater une. Certes, des trois partenaires, c’est la France qui a le plus de compétences pour développer un avion de combat. Mais elle n’a pas le budget pour mener seule ce type de programme avec le niveau d’ambition affiché à l’heure actuelle. L’Allemagne, vu son potentiel industriel et les moyens dont elle dispose, pourrait d’ailleurs monter en compétence dans ce domaine et développer seule un avion de combat. Je ne dis pas que ce serait facile, mais ce n’est pas impossible. » 

Elle pourrait aussi choisir de s'en remettre entièrement au partenaire américain, après avoir réalisé une première commande d'avions F-35. Ce qui pourrait toutefois soulever des questions de souveraineté.

Combien de temps le Rafale peut-il encore faire le job ?

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En l’état actuel des besoins, le Rafale pourrait « encore tenir la route plusieurs décennies, via des développements technologiques à venir, puisque l’on prévoit une cinquième, et bientôt une sixième version » estime Léo Péria-Peigné. 

« Mais on va finir par atteindre les limites, ajoute-t-il. N’oublions pas non plus que la prochaine arme nucléaire française (l’ASN4G) sera plus grosse que l’actuelle. Le Rafale aura-t-il le moteur suffisant pour la porter ? C’est pour cela notamment qu’il y a un programme de remotorisation en cours, via le moteur M88 T-Rex de Safran, qui est censé être le prélude à un nouveau moteur, pour le Scaf précisément. » 

A condition que ce projet ne tombe pas dans les oubliettes.

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