Le « conservatisme » en Russie : instrument politique ou choix historique ?
Le troisième mandat de Poutine se déroule sous la bannière du « tournant conservateur ». Le Kremlin est-il finalement parvenu à définir son idéologie en faisant du conservatisme sa doctrine officielle ? Ou cette invocation du conservatisme n'est-elle qu'une manœuvre politique visant l’atteinte de certains de ses objectifs ?
Les experts russes comme étrangers restent partagés. Le présent article s’efforce de tenir compte des arguments des deux parties, tout en émettant l’hypothèse que le « tournant conservateur » ne se résume pas à une simple tactique politicienne du Kremlin. Si les autorités s’en servent fréquemment pour régler certains défis à court terme, l’adoption du conservatisme est susceptible de donner naissance à une véritable stratégie de long terme.
En politique intérieure, le discours sur le conservatisme se situe dans le prolongement de la rhétorique sur la « démocratie souveraine », et peut servir de ciment idéologique. Au plan international, une Russie conservatrice peut se révéler un partenaire plus attrayant non seulement pour les droites européennes mais également pour les pays de la région Asie-Pacifique – un argument de poids à l’heure où la politique étrangère russe exprime clairement son souhait d’opérer un « pivot vers l’Est ».
Leonid Poliakov est docteur en philosophie et professeur au Département de science politique au Haut Collège d'Économie de Moscou.
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